La chancelière allemande, Angela Merkel, a accepté de présenter devant la presse, le mardi 22 septembre, une nouvelle biographie de son prédécesseur et rival politique, le social-démocrate Gerhard Schröder, en présence de celui-ci et bien sûr de l’auteur Gregor Schöllgen.
Certains n’y verront qu’une conséquence de la grande coalition (CDU/CSU-SPD) actuellement au pouvoir à Berlin. A tort. Les deux partis travaillent ensemble mais restent rivaux en vue de 2017.
Si Angela Merkel a accepté de se prêter à un tel exercice, c’est évidemment parce qu’elle a jugé que cela était dans son intérêt. Car cet hommage à Schröder est en fait une revanche. La revanche d’une femme qui, il y exactement dix ans, avait été méprisée par son adversaire qui la jugeait inapte à lui succéder, mais qui est toujours au pouvoir et au sommet de sa popularité.
Attaquée en direct à la télévision
La scène remonte au dimanche 18 septembre 2005. Tous les Allemands l’ont encore en mémoire. Les bureaux de vote ont fermé quelques heures plus tôt. La CDU arrive en tête avec 35,4 % des voix, bien moins que prévu mais néanmoins devant le SPD (34,2 %). Démarre alors le grand moment politique de la soirée : le « round des éléphants », la rencontre sur un plateau télévisé des présidents des partis au cours de laquelle chacun dit avec qui il est prêt à gouverner. A droite, Angela Merkel (CDU), Guido Westerwelle (parti libéral, FDP) et Edmund Stoiber (CSU). A gauche, le chancelier Gerhard Schröder (SPD) et son allié Joschka Fischer (Verts). A la surprise générale, Gerhard Schröder apparaît triomphant. Surtout il ne parvient pas à cacher son mépris pour sa rivale. « Vous croyez vraiment que mon parti peut accepter une offre de la CDU dans laquelle elle [il insiste bien sur ce terme] serait chancelière ? L’église doit rester au milieu du village. » Sous-entendu : le SPD doit rester au centre du jeu et garder la chancellerie. Face à lui, on voit Angela Merkel se mordre les lèvres. Elle ne s’attendait sans doute pas à une telle attaque. Mais, avec le recul, il n’est pas impossible qu’involontairement Gerhard Schröder lui ait sauvé la mise. Sa réaction a, en fait, obligé les barons de la CDU qui rêvaient de se séparer de Merkel à soutenir celle-ci.
Info: http://allemagne.blog.lemonde.fr/2015/09/22/merkel-assure-la-promo-dune-biographie-de-schroder/