Cette note se présentera en trois points :
-les règles régissant la nationalité ivoirienne,
-l’application de ces dispositions au cas Alassane Ouattara,
-la situation sociopolitique au regard de ce qui précède.
I – Les règles régissant la nationalité ivoirienne (Loi n° 61-415
du 14 décembre 1961, modifiée par la loi n°72-852 du 21
décembre 1972)
A/ Attribution de la nationalité ivoirienne à titre de nationalité
d’origine.
La question essentielle ici est celle de savoir qui est ivoirien dès
sa naissance ?
L’interprétation combinée des dispositions des articles 6 et 7 du
Code de la Nationalité montre qu’est ivoirien de naissance,
celui dont l’un au moins des parents est ivoirien au moment de
sa naissance, quel que soit le lieu de cette naissance, en Côte
d’Ivoire à l’Etranger.
B/ Règles relatives à l’acquisition de la nationalité ivoirienne
Aux termes des dispositions de l’article 24 du Code de la
Nationalité, l’acquisition de la nationalité ivoirienne résulte soit
d’une naturalisation, soit d’une réintégration, accordée à la
demande de l’étranger.
Ces deux modes d’acquisition de la nationalité ivoirienne sont
finalisés par un décret du président de la République.
C/ Dispositions transitoires du Code de la Nationalité (sur
l’acquisition de la Nationalité ivoirienne)
Par des dispositions transitoires, le Code de la Nationalité
ivoirienne permet aux personnes ayant eu leur résidence
habituelle en Côte d’Ivoire, antérieurement au 7 août 1960,
d’être naturalisées sans condition de stage, si elles formulent
leur demande dans le délai d’un an, à compter de l’entrée en
vigueur de ce code.
D/ Règles relatives à la nationalité ivoirienne
Selon l’article 48 du Code de la Nationalité, perd la nationalité
ivoirienne, l’ivoirien majeur, qui acquiert volontairement une nationalité étrangère, ou qui déclare reconnaître une telle
nationalité.
II – L’APPLICATION DES DISPOSITIONS DU CODE DE LA
NATIONALITE IVOIRIENNE DE M. ALASSANE OUATTARA
S’agissant d’Alassane Ouattara, le problème qui se pose est
essentiellement celui de sa nationalité.
En effet, le sieur Alassane Ouattara qui s’est fait élire président
du Rassemblement des Républicains (RDR), le 1er août 1999
et qui, le même jour a accepté d’être le candidat de ce parti aux
élections présidentielles de l’an 2000, a-t-il oui ou non la
nationalité ivoirienne, tant pour la validation de cette élection
partisane que pour sa candidature à la fonction de Président de
la République ?
Si l’opinion publique s’interroge là-dessus, c’est entre autres,
pour les raisons ci-après :
– la loi sur les partis politiques en Côte d’Ivoire exige que pour
être un membre dirigeant d’un parti politique, il faut être de
nationalité ivoirienne ;
– le Code électoral dispose que pour être électeur, il faut être
ivoirien, et pour être éligible à un mandat électoral (député,
conseiller municipal, etc…), il faut être électeur, c’est-à-dire,
être ivoirien préalablement ;
– la Constitution elle-même dispose que pour être président de
la République, il faut, entre autres, être ivoirien de naissance,
né de père et de mère, eux-mêmes ivoiriens de naissance.
Avant de répondre à cette question sur la nationalité ivoirienne
ou non de M. Alassane Ouattara, il y a lieu de rappeler les faits,
et ensuite examiner les procédures qu’elle a engendrées.
A/ Les faits
Né le 1er janvier 1942 à Dimbokro (Côte d’Ivoire), Alassane
Ouattara a rejoint, au début des années 50, la Haute-Volta en
même temps que ses parents qui vivaient en Côte d’Ivoire, son
père ayant été appelé à exercer les fonctions de chef de village
de Sindou, dans la région de Banfora, en Haute-Volta (actuel
Burkina Faso), ce qui est une preuve d’appartenance à sa
communauté d’origine.
C’est en Haute-Volta qu’Alassane Ouattara poursuivit ses
études primaires puis secondaires, sanctionnées par le Baccalauréat série mathématiques, au lycée Kaboré Zinda de
Ouagadougou, en 1962. De là, il se rendit aux Etats-Unis
d’Amérique, la même année, afin d’y poursuivre ses études
supérieures à l’Université de Pennsylvanie.
En Haute-Volta, comme aux Etats-Unis, en tout cas pendant la
durée de ses études, Alassane Ouattara s’est toujours présenté
avec l’étiquette de voltaïque et s’est comporté comme tel.
En effet, il s’est rendu aux Etats-Unis sous les auspices de
l’African Scholarship Program of American Universities, en
qualité d’étudiant et de boursier de la Haute-Volta.
A la fin de ses études, en 1967 – devenu majeur civil depuis
quelques années déjà – il entrait pour la première fois au FMI
en qualité d’économiste d’origine voltaïque. C’est en cette
même qualité de voltaïque qu’il entrait à la BCEAO en 1973,
d’abord comme chargé de mission, pour devenir par la suite,
Directeur des études, Conseiller spécial du Gouverneur, avant
d’être nommé dès janvier 1983 Vice-Gouverneur de la BCEAO
au titre de la Haute-Volta, en remplacement de M. Charles Bila
KABORE, un autre voltaïque parti à la retraite.
Il convient de rappeler que, c’est peu avant sa prise de fonction
en qualité de Vice-Gouverneur, qu’il a été décoré au mois de
décembre 1982, à Abidjan, par le Ministre de L’Economie et
des Finances de Côte d’Ivoire de l’époque, M. Abdoulaye
KONE, en qualité de cadre voltaïque de la BCEAO.
Pour tout dire, c’est de façon ostentatoire qu’il se présentait
partout à cette époque comme étant citoyen de la Haute-Volta.
Parti de la BCEAO, il se retrouvait à nouveau en novembre
1984 au FMI, en qualité de Directeur du Département Afrique,
toujours comme citoyen burkinabé (la Haute-Volta ayant entre
temps changé de nom pour s’appeler «Burkina-Faso, le pays
des hommes intègres»)
Du FMI, il retournait à nouveau à la BCEAO en janvier 1989,
cette fois-ci à l’initiative du Président Félix HOUPHOUETBOIGNY, pour exercer les charges de Gouverneur au titre de la
Côte d’Ivoire, en remplacement de Monsieur Abdoulaye Fadiga
décédé en décembre 1988.
Avait-il obtenu entre temps la nationalité ivoirienne ?Bien malin qui pourrait répondre à cette question !! Car la
preuve de sa naturalisation n’existe pas au Journal Officiel de la
République de Côte d’Ivoire.
Pour sûr, il occupa les fonctions de Gouverneur jusqu’à ce qu’il
soit appelé d’abord comme Président du Comité Interministériel
à Abidjan (avril 1990), puis comme Premier Ministre de Côte
d’Ivoire en novembre 1990).
Il convient de noter que là aussi, tout le monde s’était interrogé
sur la nationalité du Premier Ministre et l’opposition ivoirienne,
dont il semble avoir fait ces temps-ci son alliée, n’avait pas
hésité en son temps, à affirmer qu’Alassane OUATTARA était
burkinabé.
Cependant, l’on doit avoir à l’esprit que la particularité du
régime présidentiel ivoirien, qui fait du Président de la
République le seul détenteur du pouvoir exécutif, lui permet de
choisir ses collaborateurs librement, sans considération
d’origine, voire de nationalité.
Et le Président HOUPHOUET-BOIGNY n’en était pas à sa
première expérience en la matière, lui qui, avait déjà utilisé
dans son Gouvernement les services de personnalités venues
de tous horizons. On relèvera notamment un français à
l’Economie et aux Finances, M. Raphaël SALLER, un malien au
Plan, M. T. DIAWARA, un voltaïque à l’Agriculture, M.
Abdoulaye SAWADOGO, un sénégalais à l’Information, M.
Amadou THIAM. etc…
Pour les raisons ci-dessus, le peuple ivoirien, malgré les
critiques de l’opposition de l’époque, ne s’était pas ému outre
mesure de la nomination, au poste de Premier Ministre, Chef du
Gouvernement de Côte d’Ivoire, du burkinabé Alassane
OUATTARA.
Parce que selon nos lois, le Premier Ministre qui n’a pas de
responsabilité politique, ne répond de ses actes que devant le
Président de la République qui l’a désigné.
Il (le Premier Ministre) ne peut en aucun cas engager la
responsabilité (politique) du Gouvernement devant l’Assemblée
nationale.
A la cessation de ses fonctions de Premier Ministre, Chef du
Gouvernement, en décembre 1993, suite au décès duPrésident HOUPHOUET-BOIGNY, Monsieur Alassane
OUATTARA se retrouvera en 1994, encore une fois au FMI où
il exercera les fonctions de Directeur Général Adjoint, poste
obtenu grâce en particulier à ses relations avec Monsieur
Michel Camdessus, Directeur Général de cette Institution
financière internationale.
A cette époque déjà, M. Alassane OUATTARA voulait se
présenter aux élections présidentielles de 1995 en Côte
d’Ivoire, mais les dispositions du Code électoral de son propre
aveu, étaient qu’il ne remplissait pas les conditions d’éligibilité à
la Magistrature Suprême de ce pays.
On est donc surpris de le revoir, dès le 1er août 1999 se
déclarer candidat aux élections présidentielles de l’An 2000,
alors que :
– les conditions d’éligibilité demeurent inchangées et qu’au
surplus elles sont devenues des dispositions constitutionnelles,
– la question de sa nationalité reste toujours posée,
Et, c’est d’ailleurs pour prouver qu’il est ivoirien et qu’il remplit
les conditions d’éligibilité à la Présidence de la République qu’il
a eu à brandir au cours du Congrès du RDR qui l’a élu
président de ce Parti, une carte nationale d’identité, établie au
9ème arrondissement de Police à Marcory (Abidjan) sous le
numéro 109/00868/82 du 19 avril 1982 au nom de monsieur
Alassane OUATTARA, fils de Dramane OUATTARA et de
Nabintou OUATTARA.
Stupéfaction générale, car l’on se souvient que pendant qu’il
était Président du Comité interministériel, il s’était fait établir
sous sa dictée, et sans produire à l’appui les pièces exigées,
une carte nationale d’identité (CNI), sous le numéro
101/00946/90 du 22 octobre 1990 par le Commissaire de Police
du 1er arrondissement d’Abidjan Plateau.
En effet, si cette CNI d’avril 1982 avait existé en son temps,
pourquoi :
– s’est-il laissé décorer en décembre 1982 en qualité de cadre
voltaïque, sans réaction, puisque la détention de cette pièce
devait signifier qu’il est ivoirien ?- s’est-il fait établir la CNI de 1990 au commissariat du 1er arrondissement puisque la validité de celle de 1982, établie au commissariat de Marcory, s’étend jusqu’en 1992 ?
C’est pour éclairer l’opinion publique sur tous ces points qu’une
enquête de police fût diligentée.
En effet, l’examen de ces deux pièces d’identité révélait des
anomalies telles que le doute s’est emparé des ivoiriens les
plus incrédules, pour diverses raisons que sont, entre autres :
– l’existence de deux cartes d’identité pour une seule et même
personne alors que le problème de sa nationalité, qui
conditionne leur établissement, n’était pas encore clarifié ;
– l’existence de deux femmes comme mères pour lui seul, avec
leurs lieux de naissance différents – Nabintou OUATTARA née
à Dabou, puis Nabintou CISSE née à Odienné – n’était pas faite
pour rassurer ;
– l’existence de deux lieux de naissance du même père, en
fonction de la carte nationale d’identité du fils, ajoutait
davantage d’obscurité sur la sincérité de ces documents. En
effet, dans la CN1 établie à Marcory, le père est né à Dimbokro
en 1888 ; le même père est né à Kong à la même date dans la
CNI établie au Plateau.
C’est aussi dans ce contexte que M. Alassane OUATTARA, élu
Président du RDR, se devait de produire au dossier de son
Parti au Ministère chargé de l’Intérieur, un certificat de
nationalité ivoirienne en son nom. Cette procédure ayant été
instituée par la loi n° 93-668 du 9 août 1993 relative aux Partis
et Groupements politiques.
On notera que cette loi a été votée au moment où Alassane
OUATTARA était Premier Ministre.
Or, au lieu de chercher à clarifier ces questions d’ordre
purement juridique, M. Alassane OUATTARA se contente dans
les conférences de presse, non seulement, d’affirmer haut et
fort qu’il est ivoirien parce que son père et sa mère le sont, et
bien plus, se plaît à menacer la Côte d’Ivoire, ses
institutions et ses dirigeants de guerre civile, au cas où on
lui contesterait sa nationalité ivoirienne et sa capacité à
être éligible à la Présidence de la République.Ce sont, entre autres ces faits, cause des réactions des
militants de son Parti sur place en Côte d’Ivoire, qui ont tourné
à la dérive, et entraîné conséquemment les procédures
judiciaires entreprises.
B/ Les procédures
Elles sont de deux ordres :
– une procédure en matière civile,
– trois procédures en matière pénale.
a) Procédure en matière civile
II s’agit essentiellement de la requête en annulation du certificat
de nationalité délivré au nom de Monsieur Alassane
OUATTARA par le Juge adjoint de la section de Tribunal de
Dimbokro.
Pour répondre aux exigences de la loi relative aux Partis et
Groupements Politiques, des dirigeants du RDR ont introduit
auprès de la section de Tribunal de Dimbokro une demande de
certificat de nationalité au nom de M. Alassane OUATTARA.
Ce certificat de nationalité a été délivré sous le numéro 2084 du
28 septembre 1999, au vu de l’extrait d’acte de naissance de M,
Alassane OUATTARA,et de la photocopie du duplicata fait en
1963 de la carte d’identité de son père, carte d’identité du père
établie en 1952.
Ce certificat de nationalité signé par le Juge Adjoint de section,
n’a pas été enregistré, le numéro 2084 qu’il portait étant celui
d’un certificat délivré le 29 septembre 1999, à M. KOFFI Konan
Laurent, un autre pétitionnaire.
Encore que la section de Tribunal de Dimbokro n’était pas
territorialement compétente pour délivrer ce document, selon
les dispositions pertinentes du Code de la Nationalité
ivoirienne, le lieu de résidence connu du pétitionnaire étant
Abidjan.
De plus, la carte d’identité du père du pétitionnaire établie en
1952 n’avait pu être produite, le juge, dont on s’apercevra plus
tard qu’il est militant du RDR, s’est contenté de la photocopie du
duplicata de cette pièce, duplicata qui date de l’année 1963.
Cette pièce, même dans sa version originale, est devenue
caduque, du fait de révolution politique et administrative de
l’entité Côte d’Ivoire qui est passée de la Colonie à la République Indépendante, en passant par la République
associée dans la communauté franco-africaine.
Elle ne pouvait donc servir, a fortiori, la photocopie de son
duplicata.
C’est dire que cette pièce ne pouvait permettre d’établir la
nationalité ivoirienne du père d’Alassane OUATTARA et
partant, celle du fils.
En Droit positif ivoirien, devant de telles situations, le juge saisi
de la demande de certificat de nationalité devait, après toutes
les enquêtes, s’en référer à la Chancellerie, pour solliciter des
instructions.
Parce que le certificat de nationalité est un acte administratif et
non juridictionnel, placé par la volonté du législateur sous le
contrôle et l’autorité du Ministre de la Justice.
Mais, pour des raisons qui lui sont propres, le juge adjoint de
Dimbokro n’a pas daigné saisir ce supérieur hiérarchique qu’est
le Ministre avant de délivrer le certificat de nationalité sollicité
au nom de M. Alassane OUATTARA.
C’est donc pour faire respecter les règles applicables en
matière d’établissement et de délivrance du certificat de
nationalité, que le Procureur de la République près le Tribunal
de Première Instance de Bouaké, a introduit auprès de la
section de Tribunal de Dimbokro, une requête aux fins
d’annulation dudit certificat de nationalité.
Et c’est en réponse à cette requête que la juridiction saisie a
rendue une décision d’annulation dudit certificat.
A partir de cette décision se pose et plus que jamais, la
question suivante : «Alassane OUATTARA est-il ivoirien ?»
La réponse définitive à cette question appartient au juge civil,
en sa qualité de juge du Contentieux de la Nationalité.
Mais, d’ores et déjà, on retiendra que :
– il est certes évident qu’à sa naissance, M. Alassane Dramane
OUATARA pouvait être ivoirien, du fait que son père et sa mère
sont originaires du territoire de la Côte d’Ivoire, parce qu’à cette
époque – 1942 – les frontières de la Colonie de Côte d’Ivoire
englobaient les 4/5 du Burkina Faso actuel (ex-Haute-Volta) qui
a été intégré à la Côte d’Ivoire de 1932 à 1947 et qui s’appelait
la Haute Côte d’IvoireCependant, du fait de la reconstitution de la Haute-Volta en 1947, par regroupement de la Haute Côte d’Ivoire, d’une partie
du Niger et d’une partie du Soudan (actuel Mali), les originaires
de la nouvelle Haute-Volta ont donc perdu leur qualité d’ivoirien.
En effet, ils ne pouvaient à la fois être Voltaïques et Ivoiriens.
– le père de M. Alassane OUATTARA avait décidé dès le début
des années 50 de retourner à Sindou, le village de ses parents
pour y exercer les fonctions de Chef de ce village.
Sans exception aucune, en Afrique, l’on ne peut être chef d’un
village si l’on n’y a pas ses vraies origines.
Il est donc indéniable que si Dramane OUATTARA a été chef
du village de Sindou jusqu’au début des années 80, date de sa
mort et qu’il y a été également enterré, c’est qu’il a la nationalité
du pays dans lequel se trouve ce village, c’est-à-dire, la
nationalité voltaïque qu’il a naturellement transmise à sa
progéniture, et donc à Alassane OUATTARA.
– Le père Dramane OUATTARA ayant rejoint la Haute-Volta,
une décennie avant l’accession de la côte d’Ivoire à
l’indépendance et l’entrée en vigueur du Code de la Nationalité
ivoirienne, il n’a pu bénéficier des dispositions transitoires du
Code de la Nationalité ivoirienne, et donc les transmettre à sa
progéniture, dont M. Alassane OUATTARA.
Il suit de ce qui précède, et aussi du fait qu’à sa majorité, M.
Alassane OUATTARA a existé avec la nationalité voltaïque, en
tout cas, a vécu comme tel, que celui-ci a de facto, et de jure,
perdu sa qualité d’Ivoirien si tant est qu’il pouvait l’être à sa
naissance.
En conséquence, et en attendant qu’il utilise les voies de droit
que sont la naturalisation ou à l’extrême rigueur la réintégration
à la communauté nationale ivoirienne, M. Alassane OUATTARA
ne peut se faire établir de carte nationale d’identité ivoirienne,
parce qu’il n’est pas de nationalité ivoirienne.
b) Procédures en matière pénale
1) L’information judiciaire contre Alassane OUATTARA
Suite à l’enquête diligentée par la Direction de la Police
judiciaire, tendant à faire connaître les circonstances dans
lesquelles ont été délivrées les deux pièces d’identité de M.
Alassane OUATTARA, le Procureur de la République a ouvertune information judiciaire à l’encontre du susnommé pour faux
commis dans les documents administratifs, usage de faux,
complicité.
Ceci, pour la simple raison que dans tous les pays du monde, si
vous n’êtes pas un National de ce pays de manière avérée, et
que vous en détenez une pièce d’identité réservée aux
nationaux, vous pouvez être poursuivi au moins pour usage de
faux.
A présent, l’instruction est en cours, et la décision du juge
d’Instruction qui la diligente est attendue.
2) L’information judiciaire contre le député Gon COULIBALY
pour outrage au Chef de l’Etat
Au cours d’une marche, entrecoupée de sit-in et autres
immobilisations en masse de personnes sur la voie publique,
qui a eu lieu au début du mois d’octobre 1999, le député RDR
Amadou Gon COULIBALY, a tenu des propos injurieux à
l’endroit du Chef de l’Etat.
Suite à cela, le Procureur de la République, comme le prévoit la
loi, a décidé d’engager des poursuites pénales pour outrage au
Chef de l’Etat contre ce député.
Cependant cette procédure ne pouvait prospérer qu’après la
levée de l’immunité parlementaire du susnommé, député de
son état, sollicitée par le Procureur de la République près le
Tribunal de 1ère Instance d’Abidjan auprès de l’Assemblée
nationale.
Dans le cadre de cette procédure de levée de l’immunité
parlementaire, le mis en cause a été entendu par une
Commission Parlementaire Spéciale. Aussi, l’on est en attente
des résultats des travaux de cette commission.
3) Le jugement des infractions commises par les dirigeants du
RDR suite à la marche du 27 octobre 1999
Lors de la marche du RDR, le 27 octobre 1999, pour protester,
disaient-ils, contre la main-mise de l’Etat sur les médias d’Etat
et le prétendu arbitraire de l’Etat, des casses et des agressions
physiques ont été perpétrées.
Suite à ces actes, les dirigeants du RDR ont été interpellés puis
jugés, en application de la loi n° 92-464 du 30 juillet 1992 portant répression de certaines formes de violences, dite «loi
anti casseur».
Cette loi punit de peines d’emprisonnement les instigateurs et
organisateurs de rassemblements ayant donné lieu à des
destructions de biens meubles et immeubles et à des violences
et autres voies de fait sur les personnes.
C’est donc en considération de ce qui précède, que le Tribunal
correctionnel d’Abidjan, en son audience publique du vendredi
12 novembre 1999 a, entre autres, condamner à 24 mois
d’emprisonnement certains dirigeants du RDR dont la
Secrétaire Générale Mme DAGRI Henriette, épouse DIABATE.
Ces derniers ne sont donc pas incarcérés du fait de leurs
opinions, mais du fait des casses qui se chiffrent à près de 2
millions de dollars, soit plus de 1 milliard et demi de francs CFA.
III SITUATION SOCIO-POLITIQUE
A) Fondement des procédures
Il convient ici, de préciser que toutes ces procédures n’ont pour
but que celui d’assurer le respect de la loi, c’est-à-dire, des
normes établies par tout le peuple ivoirien, et il ne paraît pas
inutile de rappeler que la loi s’applique à tous, c’est-à-dire, entre
autres :
– aussi bien aux dirigeants politiques qu’à leurs militants,
– aux administrateurs comme à leurs administrés,
– aux gouvernants comme aux gouvernés,
– au législateur lui-même, bref à tous ceux, hommes et femmes,
qui vivent dans ce pays de paix qu’est la Côte d’ivoire.
Aussi, c’est à partir de notre soumission à la loi que se
construira le triomphe de l’Etat de droit. Cet Etat de droit
réclamé par tous, mais dont la réalisation commande à chacun
de nous, respect des Institutions Républicaines.
Comme on le voit, la loi ne vise jamais un individu, elle ne régit
que des situations objectives. C’est pourquoi d’ailleurs dans le
cas d’espèce, nous relevons qu’un ancien Premier Ministre
comme Alassane OUATTRARA, ayant initié la loi anti casseurs,
voit aujourd’hui ses partisans sanctionnés au titre de cette loi,
parce que justement se trouvant dans la situation définie par
elle.Il n’est donc pas exact de soutenir que les procédures en cours
sont faites pour empêcher quelqu’un de devenir Président de la
République, encore moins, pour empêcher un musulman
d’accéder à la Magistrature Suprême de Côte d’Ivoire, comme
l’a soutenu M. Alassane OUATTARA lors d’une de ses
nombreuses conférences de presse à Paris.
Le respect de la loi apparaît une chose sacrée en Côte d’Ivoire
et c’est pour cela que les droits de la défense sont garantis à
toutes les étapes du procès pénal ou du procès civil, et que les
voies de recours sont aménagées pour ceux qui contestent les
décisions rendues. Et, c’est parce qu’elles existent, ces voies
de recours, que le collectif des avocats du RDR et de M.
Alassane OUATTARA en use constamment au profit de ses
clients.
B/ Situation des musulmans en Côte dIvoire
S’agissant tout particulièrement de la situation des musulmans
de Côte d’Ivoire, il convient de réaffirmer, que dans le strict
respect des dispositions de la Constitution qui font de la Côte
d’Ivoire un Etat laïc, respectueux de toutes les croyances et
acceptant les non-croyants, le Gouvernement accorde un
traitement égal à toutes les confessions religieuses, en même
temps qu’il crée les conditions d’une saine pratique de la
religion, en aidant toutes les religions à multiplier leurs édifices
et à soutenir leurs fidèles.
Nous rappellerons sur ce point les interventions conséquentes
du Chef de l’Etat et du Gouvernement pour aider à la
construction des églises, des temples, des mosquées, et aussi
pour participer aux frais générés par les départs en pèlerinage,
tant vers les lieux saints de la Chrétienté que des lieux saints
de L’Islam.
C’est donc exprimer une contre-vérité que de dire que la
religion musulmane est marginalisée au point de voir les
musulmans interdits d’accès au pouvoir en Côte d’Ivoire.
C/ L’Ivoirité
Ce néologisme se définit comme étant l’affirmation d’une
personnalité culturelle, et le moyen de l’épanouissement de
l’Homme ivoirien dans ce qui fait sa spécificité. Il s’agit de
rechercher et de réunir les conditions les plus favorables à la réalisation de cette particularité, qui constitue une synthèse
originale et féconde entre nos traditions et la modernité. Et
cette œuvre doit être accomplie par tous, aussi bien par le
pouvoir politique que par l’ensemble des citoyens.
Autrement dit, l’ivoirité est un facteur de rassemblement et non
d’exclusion, qui doit permettre à tous, Ivoiriens de naissance ou
d’adoption, vivant dans notre pays ou vivant à l’extérieur mais
se réclamant de la Côte d’Ivoire, de pouvoir défendre l’identité
culturelle ivoirienne à travers laquelle ils peuvent se
reconnaître. C’est dire que le concept de l’ivoirité qui a un
contenu fédérateur, n’est pas un concept juridique, et ne se
conçoit donc pas en terme de nationalité.
D/ Elections de l’An 2000
S’agissant enfin des élections de l’an 2000, l’on ne peut non
plus soutenir que les procédures ci-dessus énumérées sont
entreprises pour écarter tout opposant au pouvoir actuel, de la
course à la Présidence de la République.
En effet, ce n’est pas parce qu’il y aura élection qu’il faut laisser
le désordre s’installer sur le territoire national, car la démocratie
ne peut être synonyme de désordre.
Certes, comme dit l’adage «l’opposition s’oppose et le
Gouvernement gouverne», mais cela signifie, entre autres, que
:
– chacun dans sa position doit respecter les limites qu’impose le
droit,
– le gouvernement doit assurer ses missions, qui impliquent
entre autres, le maintien de l’ordre public et la sauvegarde de la
paix sociale.
De plus, le fonctionnement régulier des Institutions
républicaines invite les uns et les autres, à observer les délais
impartis par la loi pour la présentation des candidatures et la
propagande électorale.
En clair, les questions d’éligibilité seront débattues et réglées,
en temps opportun, par les organes compétents, tel le Conseil
Constitutionnel. Cela ne peut intervenir avant le délai prévu par
la loi. En effet, le Code électoral donne au Pouvoir
réglementaire le soin de déterminer le délai de réception des
candidatures à la Présidence de la République, au niveau du Conseil constitutionnel, tout en précisant que ce délai expirent
21 jours avant la tenue du scrutin présidentiel.
Le premier tour du scrutin, en ce qui concerne l’élection
présidentielle, devant avoir lieu, selon les dispositions
constitutionnelles, dans le courant du mois d’octobre de l’an
2000, les candidatures seront attendues pour le mois de
septembre de l’an 2000.
Ce n’est donc pas le Président de la République qui apprécie
les candidatures et déclare éligibles ou inéligibles les
prétendants à la Magistrature Suprême.
En conclusion, il y a lieu de replacer les faits et les procédures
actuelles qu’ils ont suscitées dans leur contexte juridique
normal, et ne pas les lier nécessairement aux échéances
électorales de l’an 2000.
Fait à Abidjan, le 26 novembre 1999
Présidence de la République de Cote d’Ivoire
Henri Konan Bédié