by Le Magazine de la Diaspora Ivoirienne et des Ami(e)s de la Côte d’Ivoire | 5 août 2011 16 h 09 min
On prend les mêmes ingrédients et on recommence, tant l’impression du déjà-vu est forte. L’Egypte n’est pas sortie de l’auberge avec ces contentieux, et les équivoques qu’ils drainent, qui minent nos sociétés. Ces sociétés qui fonctionnent sur le mode de la tribu sourcilleuse sur la conformité de pensée. La différence n’a qu’une signification : la rupture de ban. La différence n’a que trois sanctions possibles : la réclusion, le bannissement ou la mort. La destitution de Hosni Moubarak et l’ouverture démocratoïde qui s’en est suivie a plongé le pays dans l’inévitable débat identitaire, quand la lame de fond populaire promettait que plus personne n’aurait le droit d’avoir raison contre tous. C’était conclure trop vite à une telle avancée de la conscience humaine.
Des années de verrouillage de la pensée, appuyé sur les ressorts les plus archaïques des groupes humains, ont donné le fruit escompté. Le refus de l’autre qui ne nous ressemble pas, à cause de la peur de l’inconnu ou de ce qui défie la compréhension. Le rejet du format qui ne s’emboîte pas dans l’ensemble. Parce que la tribu se sent toujours menacée par la remise en cause de ses codes. Tant pis si cette tribu fraternelle, solidaire et communautaire n’est plus, et que celle qui nous est imposée est inégalitaire, impitoyable, sans états d’âme, où le fort écrase le faible et où l’argent règne en maître. Moubarak en était le symbole ultime.
Mais l’Egypte va s’occuper de régler ses comptes avec ce qui n’a rien à voir avec les causes de la misère et de la dictature. Elle va se retourner contre elle-même pour tenter vainement de construire une autre tribu, avec ses dizaines de millions de pauvres, de chômeurs et de toutes sortes d’exclus. Beaucoup vont peut-être s’entretuer, sauf ceux qui planent au-dessus de la mêlée, qui font des affaires et qui se moquent de ce qui peut bien arriver, tant que leur fortune prospérera.
La déferlante attendue sur l’iniquité n’aura pas lieu, son énergie sera consacrée à s’attaquer au mode de vie du voisin et de ses femmes ou à défendre son mode de vie contre le voisin qui veut l’interdire. Un jour lointain le cauchemar finira, d’une façon ou d’une autre, pour un peuple extenué, sans vrais vainqueurs et sans vrais vaincus, alors que le monde aura réalisé de nombreuses conquêtes scientifiques, économiques, sociales et culturelles. La «révolution» sera loin derrière, inscrite aux comptes et profits d’une formation sociale pour laquelle les libertés publiques seront pour longtemps une hérésie, au grand bonheur des partisans de l’ordre.
C’est ce qu’inspire ce qui s’est produit sur la place Tahrir où se sont dessinées les prémices d’une tragédie que l’Algérie a connue (le repli islamiste, Ndlr). La merveilleuse épopée du peuple égyptien devrait-elle réellement finir ainsi ? La fantastique démonstration de la mythique place du Caire débouchera-t-elle sur un désastre ? Ces jeunes, ces vieux, ces femmes, ces hommes, ces gens formidables qui ont donné une admirable leçon de dignité et de courage à l’Humanité entière y compris aux peuples de ces démocraties dites grandes.
Par Ahmed Halfaoui
Source URL: https://www.ivoirediaspo.net/egypte-les-islamistes-sinvitent-sur-la-mythique-place-tahrir/6349.html/
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