by Le Magazine de la Diaspora Ivoirienne et des Ami(e)s de la Côte d’Ivoire | 12 mars 2011 21 h 42 min
LONDRES — La « bataille du cacao » est devenue cruciale dans le bras de fer qui oppose depuis novembre M. Gbagbo à Alassane Ouattara, reconnu président élu par la communauté internationale, qui a appelé en janvier à l’arrêt des exportations de fèvres brunes du pays.
Cet appel, qui court jusqu’au 15 mars, est jusqu’à présent largement respecté par les grands négociants et chocolatiers, paralysant les exportations ivoiriennes (un tiers de l’offre mondiale) et affolant les cours du cacao.
Le prix de la tonne de cacao est monté la semaine dernière à New York jusqu’à 3.775 dollars la tonne, un sommet depuis 1979.
Or, le camp de Laurent Gbagbo a mis cette semaine la pression sur les multinationales du secteur, leur donnant jusqu’au 31 mars pour exporter quelque 400.000 tonnes de fèves stockées dans le pays, sous peine de sanctions.
L’annonce du volume important de ces réserves a favorisé un léger repli des cours, sans toutefois apaiser la nervosité des opérateurs.
« Dans l’immédiat, cela n’éclaircit pas vraiment la situation, il y a encore d’immenses incertitudes. C’est une tentative de Gbagbo de reprendre la main, mais même s’il confisque les stocks de cacao, on ne voit pas bien à qui il les vendra », explique à l’AFP Kona Haque, analyste de la banque Macquarie.
« Les sanctions de l’Union européennes et les Etats-Unis à l’encontre de l’administration Gbagbo sont rigoureusement maintenues, or il s’agit des principaux marchés pour le cacao ivoirien », a-t-elle ajouté.
Jusqu’à présent, quelque 80% de la production du pays étaient exportés vers l’Europe.
Du côté des acteurs industriels, la prudence règne.
Le groupe helvétique Barry Callebaut, numéro un mondial du chocolat industriel, a assuré « ne pas vouloir spéculer » sur les implications de la dernière annonce de M. Gbagbo. Interrogé par l’AFP, Cargill, géant américain de l’agroalimentaire, s’est également refusé à faire tout commentaire.
Confrontées à ces pressions, les entreprises « ont-elles l’intention de sacrifier leurs stocks ? », s’interroge Mme Haque.
Selon les autorités publiques ivoiriennes, Cargill détiendrait dans le pays 50.000 tonnes de cacao et la Société africaine de cacao (Saco, groupe suisse Barry Callebaut) quelque 100.000 tonnes.
Le groupe singapourien Olam International a quant à lui assuré que ses stocks en Côte d’Ivoire « étaient actuellement sécurisés ».
« Nous sommes pour l’instant capables de répondre à la demande de nos clients, avec des fèves provenant d’autres origines », a par ailleurs déclaré à l’AFP Gerry Manley, directeur de la branche cacao du groupe.
L’Organisation internationale du cacao (ICCO) attend pour l’année 2010/2011 un surplus de production de 119.000 tonnes sur le marché mondial de la fève brune, en incluant la production ivoirienne, en raison de conditions climatiques très favorables en Afrique de l’Ouest.
Voisin de la Côte d’Ivoire et deuxième exportateur mondial, le Ghana a ainsi enregistré depuis octobre une augmentation de 40% de sa production sur un an.
La saison 2011-2012 pourrait néanmoins voir s’exacerber les tensions du marché, avertissent les experts.
« Plus la situation d’enlisement persiste, pires sont les perspectives pour la filière cacao de la Côte d’Ivoire, en raison du manque d’investissements » dans les exploitations, confrontés à un vieillissement critique des arbres, a indiqué à l’AFP Carsten Fritsch, analyste de Commerzbank.
S: Les Echos
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