by Le Magazine de la Diaspora Ivoirienne et des Ami(e)s de la Côte d’Ivoire | 16 septembre 2017 12 h 57 min
L’Editorial du Professeur Augustin Dibi Kouadio
Le cours de la vie politique dans notre pays conduit à penser que nous ne parvenons pas à convenablement nous instruire de notre passé, même le plus récent afin de porter la vue au loin. Ce passé est négligé au point même de tomber dans l’exil de l’oubli. Nous ressemblons alors à des voyageurs qui, ayant pris le train, s’endorment pour ne se réveiller qu’au moment de la collision.
N’est-il pas regrettable que le Rassemblement des Houphouétistes pour la Démocratie et la Paix, ce beau cadeau du destin, ne parvienne pas à être adéquat à son concept, à honorer l’élan initial qui le porta au jour, et que les partis politiques qui le composent ne regardent plus dans la même direction ? Tout se passe comme si l’on avait oublié l’endurance des cinq mois passés à l’hôtel du Golf, le silence glacial des nuits dans la muette inquiétude pour le lendemain, le frémissement sous la mort que l’on sait menaçante à l’extérieur, à des carrefours et dans des quartiers ! Faut-il que la perspective des élections en 2020 nous conduise à oublier tout ce que nous avons vécu et l’Appel historique de Daoukro qui a sauvé notre pays quand il était sur le point de sombrer dans la nuit la plus obscure ?
A un moment où la Côte d’Ivoire naviguait sans ancre ni compas, il a fallu rappeler qu’elle doit se hâter de retrouver la sève subtile qui la fécondait dans sa marche pour lui assurer vitalité et verticalité, afin de briller à nouveau comme une étoile flamboyante. Il a fallu rappeler que les raisons d’unir doivent toujours être plus fortes que celles de diviser et de séparer, que les fondations de la maison sont déjà là, posées par son premier bâtisseur, et qu’il convient de se rassembler autour de l’essentiel afin de consolider ce que la sagesse a si heureusement planté.
En quelques années, la Côte d’Ivoire n’a-t-elle pas réussi à renouer avec sa vocation pour redevenir fréquentable, sous la conduite de ceux qui, conscients qu’un héritage a été laissé comme un vase rempli d’une liqueur précieuse, veulent le perpétuer et le faire fructifier avec force et beauté ? Les progrès déjà réalisés après la crise que nous avons traversée révèlent que le RHDP est à l’image d’une vigne. Les pousses élégantes qu’il nous fait voir de l’œuvre initiée offriront des fleurs qui ne manqueront pas de produire des fruits splendides et abondants. Il n’est que de prendre comme seul exemple le pont Henri Konan Bédié qui aurait pu demeurer un simple projet et ne jamais voir le jour, mais qui désormais, est venu à son heure s’étendre là, en fierté et en majesté pour exhaler comme la rose son parfum que seul pourrait ne pas supporter celui qui a perdu la saveur des choses.
Historiquement, dans la genèse temporelle des choses, le Rassemblement des Houphouétistes pour la Démocratie et la Paix procède des partis politiques qui le composent : il vient après eux. Cependant, essentiellement, dans la genèse idéale des choses, il les précède infiniment : il vient avant eux en tant que leur lieu d’origine, leur raison d’être, ce à quoi ils ont toujours aspiré, la source qui les a, avant tout, appelés à l’existence temporelle. En effet, le vœu secret du Président Houphouët Boigny, en créant un parti politique, quel qu’en soit le nom, n’a-t-il pas toujours été de ramener la diversité à l’unité, de rassembler ce qui est épars, de nous inviter à dilater notre cœur pour l’étendre aux dimensions d’autrui, afin de « forger, unis dans une foi nouvelle, la patrie de la vraie fraternité » ? Ceux qui se reconnaissent en l’idéal qu’il a toujours poursuivi devraient, en bonne logique, se soucier de se hâter de conduire le RHDP à l’effectivité d’un parti politique qui soit la pierre angulaire, là au milieu, en cet espace infini de la médiation où les choses germent dans le silence avant que de s’offrir à la lumière du jour, et où le pain est proposé pour être simplement rompu et partagé.
La dissonance et le bruissement actuels des choses procèdent de ce que l’idée ne s’est pas encore donné un remplissement dans l’effectivité, qu’elle tarde à s’accomplir sous la forme et le contenu de la réalité concrète d’un parti politique, comme si l’on craignait de perdre quelque chose en allant au lieu de la synopse, à la vue conciliante, à un pôle rassemblant. L’expérience révèle que nous perdons davantage de temps en vivant dans la crainte d’une tâche à accomplir qu’en l’accomplissant tout simplement. Au fond, ce qui manque ne serait-il pas ce rien de l’humilité qui n’est pas humiliation, mais plénitude, regard tourné vers le Ciel, par quoi il nous est possible de dissoudre notre nature propre afin de nous laisser aiguiser par l’autre ?
Les partis politiques ne doivent pas être fétichisés et fixés en des choses absolues. Ils n’accomplissent leur vocation qu’à s’ordonner à un appel venant de plus loin qu’eux qui les invite à se soucier de l’intérêt général, du visage de l’autre en face de moi. De temps à autre, de la fenêtre de l’éternité où il se trouve, le premier bâtisseur de notre pays sort certainement la tête pour voir si ses héritiers se soucient de consolider son œuvre, en la poussant vers l’avant afin qu’elle devienne la maison où le moineau trouve un abri et l’hirondelle un nid pour sa nichée.
L’esprit du Président Houphouët Boigny a suscité l’idée du RHDP. La source d’eau vive est donc là, nous invitant à ne plus creuser des citernes fissurées, incapables de retenir l’eau.
DIBI Kouadio Augustin,
Professeur Titulaire de Philosophie
Université Félix Houphouët Boigny
Source URL: https://www.ivoirediaspo.net/pour-une-consolidation-du-rhdp/16606.html/
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