by Le Magazine de la Diaspora Ivoirienne et des Ami(e)s de la Côte d’Ivoire | 11 janvier 2018 16 h 18 min
(AFP) Des heurts ont éclaté pour une troisième nuit consécutive entre forces de l’ordre et jeunes dans plusieurs villes de Tunisie, où plus de 600 personnes ont été arrêtées depuis lundi, a indiqué jeudi le ministère de l’Intérieur.
Les autorités ont toutefois jugé que l’intensité des violences, alimentées par une grogne sociale, avait diminué.
Les troubles ont éclaté lundi alors que s’approche le septième anniversaire de la révolution tunisienne, qui réclamait travail et dignité et a chassé du pouvoir le dictateur Zine el Abidine Ben Ali le 14 janvier 2011.
Ils interviennent également à quelques mois de la tenue prévue d’élections municipales, attendues de longue date pour consolider la transition démocratique.
Le mois de janvier est traditionnellement une période de mobilisation sociale en Tunisie, où le contexte est particulièrement tendu cette année en raison de hausses de prix très critiquées par la population.
– ‘Vandales’ –
Après des manifestations pacifiques sporadiques la semaine dernière, des groupes de protestataires, souvent très jeunes, se sont livrés à partir de lundi à des pillages et émeutes, obligeant l’armée à se déployer autour de nombreuses banques, sièges des impôts et autres bâtiments sensibles.
Mercredi, 328 personnes ont été arrêtées pour des vols, pillages, incendies volontaires et blocages de route commis au cours des derniers jours, a indiqué à l’AFP le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Khalifa Chibani.
Cela porte à plus de 600 le nombre de personnes interpellées depuis lundi. Mardi, 237 personnes avaient déjà été arrêtées, et 44 la veille, selon la même source.
Mais selon M. Chibani, « l’intensité des violences a diminué par rapport aux jours précédents ».
Quelques villes ont été à nouveau le théâtre de heurts entre police et jeunes jetant pierres ou coktails molotov, dans la nuit de mercredi à jeudi, dont Siliana (nord-ouest), Kasserine et Sidi Bouzid, dans le centre marginalisé du pays, ou encore Tebourba, à 30 km à l’ouest de Tunis.
Des échauffourées ont également eu lieu dans certains quartiers de Tunis.
A Tebourba, où un homme est décédé lors des heurts dans la nuit de lundi, la police lancé des gaz lacrymogènes sur quelques dizaines de manifestants descendus dans la rue, a indiqué un habitant.
Lors d’une visite mercredi près de Tebourba, le Premier ministre Youssef Chahed a condamné les actes de « vandalisme » regrettant que « à chaque fois qu’il y a des frictions sociales en Tunisie, les vandales se manifestent ».
Le Front populaire, parti d’opposition accusé par le gouvernement de soutenir les casseurs, a appelé jeudi M. Chahed à « trouver des solutions pour les jeunes tunisiens », estimant que « les manifestations pacifiques font partie de l’équation démocratique ».
– ‘Jeunes déçus’ –
« Mais casser les biens publics (…) est illégitime », a néanmoins souligné Hamma Hammami, porte-parole du FP, gauche.
Le principal poste de police de Thala (nord) a été incendié, a encore indiqué M. Chibani, ajoutant que 21 policiers avaient été blessés mercredi à travers le pays, et assurant qu’aucun civil n’avait été blessé.
Après plusieurs années de marasme économique et d’embauches massives dans la fonction publique, la Tunisie, confrontée à d’importantes difficultés financières, a fait appel au FMI, qui a débloqué 2,4 milliards d’euros sur quatre ans en échange d’un programme visant à réduire les déficits.
Le dinar a dévissé face au dollar, l’inflation a dépassé les 6% fin 2017 et le budget 2018 prévoit de nouveaux impôts et des hausses de TVA qui viennent encore renchérir le coût de la vie.
Pour la politologue Olfa Lamloum, « la nouvelle loi de finances est la goutte d’eau qui fait déborder le vase ».
« Les jeunes sont déçus par rapport à la révolution, surtout à cause de la cherté de la vie », dit-elle, soulignant « l’approfondissement des inégalités sociales mis en évidence par les statistiques officielles » — hausse du taux de pauvreté, du chômage et de l’illettrisme chez les jeunes notamment.
Les militants de la campagne « Fech Nestannew » (Qu’est-ce qu’on attend, ndlr), qui réclame une révision de la loi de finances 2018, ont appelé à manifester massivement vendredi.
La puissante centrale syndicale UGTT a quand à elle appelé à un rassemblement dimanche à Tunis pour la commémoration du 7e anniversaire de la révolution de 2011.
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