Par un aigle géant, portés bruyamment,
Les rapaces ont envahi notre petite cour
Tous férus d’ivoire couramment indexé.
Ils sont venus de trois horizons lointains
Par centaines, grisés chacun de quatre vins.
Parmi eux, des vautours crâneurs,
Des charognards dédaigneux et fiers,
Des corbeaux fugitifs de nos champs.
Puis, comme des convives très attardés
Les falconiformes de notre basse-cour
Ont aussi accouru au rendez-vous indigne
Du blanchissage des ossements entassés.
Pour impressionner et pour faire grandiose
Trois mille rapaces aux affreux ramages
Tous abonnés aux pratiques sataniques
Ont assombri le ciel déjà noir de notre cour.
Mais le nombre attendu bien en-deçà,
A été couronné par nos beaux volatiles
Fortement acclamés pour leur plumage.
Ils ont, par un tour de charme magique,
Gagné le cœur des maîtres du monde.
S’élevant alors sur leurs serres d’acier,
Tous ont jubilé heureux de se retrouver
Pour le décompte de leurs exploits passés.
Par coups de becs et de griffes entrelacées
Ils ont jasé sans retenue des heures durant
Pour exhiber leurs talents et leurs aptitudes.
Au bilan, ils n’ont pu qu’annoncer fièrement
Quatre cents quarante milliards de plumes
A titre d’intentions de leur étonnante bonté
Pour astiquer, refaire resplendir toute la cour
Et blanchir à la chaux pure tous les tombeaux.
Ils espèrent ainsi effacer à jamais des mémoires
Les souvenirs des patriotes arrosés et incinérés
Les massacres épurateurs de Guitrozon,
Les fosses de l’ignominie de Nahibly.
Leurs majestés les aigles altiers des airs
En ont ainsi souverainement décidé :
Notre cour, petite portion du monde,
Objet de convoitise pour ses trésors
Doit être régentée par le capital froid
Et par les multinationales enfiévrées.
Ce fut la raison de la ronde des rapaces
Ronde de l’insolence et de la mystification
Ronde de la corruption et de la trahison
Ronde de l’iniquité et de l’oppression.
Mais nos yeux sont restés hagards et insoumis
Rien ne peut nous reconquérir ni apprivoiser.
Lazare KOFFI KOFFI
Exilé politique