Les chiffres officiels parlent de 11 à 13 tués lors de l’expédition punitive des dozos et autres partisans du régime Ouattara contre le camp des déplacés interne de Nahibly à Duékoué.
La vie des Wê a-t-elle encore de la valeur aux yeux du pouvoir Ouattara?
Pourtant, le bilan pourrait être largement plus lourd. C’est du moins ce que révèle une source militaire contactée sur place. «Plus de 60 jeunes déplacés Wê ont été pris dans le camp de réfugiés, vendredi dernier, aux environs de 12h, et embarqués devant tout le monde dans 3 cargos. Pendant ce temps, les dozos, d’autres Frci et de nombreux jeunes Malinké armés de machettes et de barres de fer commettaient des atrocités dans le camp. C’était à la fois écoeurant et insoutenable mais nous étions impuissants», révèle la source. Témoin des massacres perpétrés par les forces armées pro-Ouattara (Frci et dozos) sur les réfugiés internes Wê, elle nous a livré, hier, sous le couvert de l’anonymat, des informations ahurissantes. Selon ce militaire, les 60 jeunes Wê ont été amenés vers une destination inconnue par les Frci de Duékoué conduits par leur chef, un certain Lieutenant Konda.
Un ancien adjudant au sein des Forces armées nationales de Côte d’Ivoire (Fanci) avant de rejoindre la rébellion armée pro-Ouattara. Le lieutenant Konda aurait participé, soutient notre source, au génocide Wê, en mars-avril 2011. «C’est Konda qui conduisait l’opération d’arrestations des jeunes Wê, vendredi dernier. Ils les ont embarqués dans 3 cargos et les ont d’abord envoyés dans le camp Frci situé à proximité de la mairie. Ensuite, ils les ont conduits au quartier Kokoma peuplé en majorité de Malinké. Là où ils savent que s’ils commettent les massacres, on n’ira pas enquêter parce que c’est un quartier fortement hostile où ni nous, ni l’Onuci ne peuvent entrer. Ce quartier est une poudrière à ciel ouvert», soutient le corps habillé. Avant d’ajouter que «les jeunes Wê ont été tous exécutés. Lorsque nous en avons été informés, le CB (Commandant de brigade de la gendarmerie, ndlr) a joint au téléphone le Lieutenant Konda pour lui demander de ramener les jeunes qu’ils ont embarqués.
Konda lui a répondu qu’il les a libérés et qu’il envoie leur liste. Le CB a rétorqué qu’il ne veut pas de liste mais les personnes vivantes. Konda a raccroché». Au dire de notre interlocuteur, à l’instar de la gendarmerie de Duékoué, l’Onuci et les Ong humanitaires présentes dans la localité ont réclamé, sans succès, les jeunes Wê que les Frci ont embarqués. Les Frci présents à Duékoué sont ceux qui ont déjà massacré les populations Wê durant la crise postélectorale. Tant qu’ils seront ici, les massacres ne s’arrêteront pas. Tout ce que le Commandant Allah, porte-parole de l’armée, a dit à la télévision, c’est totalement le contraire de ce qui s’est passé ici à Duékoué», affirme la source militaire.
Pour qui, le massacre des déplacés internes de Duékoué était prémédité. «Il y a longtemps que les Frci et les dozos voulaient attaquer le camp des déplacés Wê. Surtout après la visite du chef de l’Etat, Alassane Ouattara, à l’ouest. M. Ouattara avait demandé aux déplacés Wê de quitter les lieux alors que ces derniers ne savent pas où aller. Leurs villages ont été détruits et leurs terres sont occupées par les dozos. L’Onuci et les humanitaires le savent très bien. Lorsqu’il y a eu les 4 personnes tuées par des braqueurs, les dozos et les Frci ont automatiquement accusé, sans preuve, les déplacés Wê. Les dozos ont encerclé le camp et les massacres ont commencé», précise notre interlocuteur.
Didier Depry
Source: Notre Voie