Vu les attaques multiples contre les FRCI en 48 heures, le gouvernement ivoirien, sur décision du chef de l’Etat, après consultation du Premier ministre par intérim et du ministre délégué auprès du Président de la République, chargé de la Défense, a pris des mesures importantes. De même une déclaration du FPI a été faite pour condamner ces attaques contre les FRCI. Cela devrait être une démarche normale. Pourtant, la suspicion politique en Côte d’Ivoire a encore la vie dure, et bien de gens ont du mal à appréhender les choses à leur juste mesure. Lors de la finale de la coupe d’Afrique des Nations en janvier dernier à Libreville, le FPI a produit une timide déclaration passée inaperçue et surtout pas diffusée sur les médias d’Etat. A cause de leur douleur d’exilés, ou à l’idée que le vrai père de la victoire des Eléphants serait le Président Ouattara, des Ivoiriens bon teint, des fanas des Eléphants, des amis des joueurs ont souhaité la défaite pour leur pays. Et dans des bars, cette défaite a été célébrée. Aujourd’hui parce que des journaux et quelques individus tentent de remettre en cause la légitimité et la légalité du Président Alassane Ouattara (des lâches et des désespérés selon les propres termes du chef de l’Etat) il se trouve des agitateurs d’idées pour faire porter le chapeau au FPI, sous prétexte que ce parti est dominé par les extrémistes, dont il faut couper la tête. Pourtant, cette option de fermeté et de pression contre les radicaux et les extrémistes FPI ou pro-Gbagbo n’a jamais pu pousser le parti à changer d’option, au sujet de ses revendications. Au FPI, qu’on soit modéré ou radical, qu’on soit exilé ou vivant en Côte d’Ivoi- re, les exigences sont les mêmes : une justice équitable pour tous, que les vaincus comme les vainqueurs soient poursuivis par la justice, qu’il n’y ait pas un temps pour juger d’abord les pro-Gbagbo, les maintenir en prison avant de s’occuper des libérateurs, que les exilés puissent rentrer au pays, que les détenus politiques soient mis en liberté provisoire, que les comptes soient dégelés, avec l’espoir que l’ensemble de ces conditions permettra de créer un cadre de vie démocratique normal et apaisé permettant aux Ivoiriens de vaquer librement à leurs occupations. En retour, dans la perspective de 2015, le président Alassane Ouattara aura la garantie d’une paix sociale lui permettant de dérouler ses solutions pour la reconstruction de la Côte d’Ivoire.
Une union sacrée est nécessaire pour lutter contre les assaillants et les tueurs du FPI. Des mesures ont été arrêtées hier par le chef de l’Etat, qui a remercié les autorités du Ghana pour leur collaboration. Il y a la colère au sommet de l’Etat, mais il est important de conseiller aux uns et aux autres la retenue. La colère est mauvaise conseillère. Le Ghana et la Côte d’Ivoire n’ont pas intérêt à se faire la guerre. Le conflit entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire ont montré la difficulté de la situation. En sa qualité de président de la Cedeao, le chef de l’Etat a des exigences et des responsabilités. Il règle le conflits au Mali, en Guinée Bissau par le dialogue, dans la fermeté. La fermeté manifestée en Côte d’Ivoire ne doit pas faire perdre de vue, l’exigence de souplesse et les voies de la diplomatie, d’autant plus que les relations personnelles sont fortes. Encore une fois, il faut noter que la colère est mauvaise conseillère, et que les personnes de bonne volonté tant en Afrique qu’ailleurs, doivent jouer les bons offices pour éviter le clash entre la Côte d’Ivoire et le Ghana. Car à y voir de près, les décisions du gouvernement ivoirien prises en dehors du Conseil national de sécurité ressemblent bien, à une sorte de déclaration de guerre contre le Ghana présenté comme un pays ennemi et belligérant. Les termes diplomatiques utilisés, ne cachent pas les mots employés par le ministre Paul Koffi Koffi. Enfin, il est bon de noter que les frontières africaines sont bien poreuses et peuvent servir à toutes sortes de déstabilisation. Les présidents ghanéen et ivoirien ont le devoir d’agir dans le sens de la paix. Dans un tel contexte, qui rappelle celui de Septembre 2002, dix ans jour pour jour, on se demande ce qui se serait passé si la Force Licorne et l’Onuci n’étaient pas en Côte d’Ivoire. Comment peut-on avoir tant de forces militaires sur place et tant d’appuis diplomatiques et arrêter des mesures aussi fortes même si elles peuvent paraître justifiées dans l’immédiat. Dans la durée, les conséquences aussi bien pour la Côte d’Ivoire que pour le Ghana seront fort dramatiques. Par exemple, la compagnie Emirates ne pourra plus venir à Abidjan, les envois et transferts d’argent pourraient être réduits ou contrôlés, les communications téléphoniques pourraient être mises sous surveillance. Que de désagréments !
L’heure est-elle grave à ce point ? Les assaillants étaient si lourdement armés ? Pouvaient-ils déstabilser et renverser le régime aux yeux et à la barbe de la communauté nationale et internationale ? Toutes ces questions interpellent sur la nécessité de recourir au dialogue politique intégral et sans concession pour lutter contre les désespérés. D’aucuns peuvent encore douter de la bonne volonté de la réaction du FPI, certains peuvent exulter et applaudir la fermeté du chef de l’Etat, mais il faut calmer le jeu. La colère est mauvaise conseillère, en tout temps et en tout lieu. Aussi bien pour le Ghana que pour la Côte d’Ivoire. John Mahama Dramani et Alassane Ouattara n’ont pas le droit de faire comme Laurent Gbagbo et Blaise Compaoré l’ont fait, avant de se rapprocher après avoir été amis, et partenaires. Puisque tout était parti pour que les deux leaders aient de bonnes relations. Il ne faut pas penser que le Ghana joue double jeu et se fout des autorités ivoiriennes. Le Ghana ne doit pas demeurer dans une logique souverainiste et de faiblesse. L’heure est grave. Mais il ne faut pas aider les loups à hurler. Justement parce que l’heure est grave,
il faut apaiser et appeler au calme au nom de la nécessaire paix pour les peuples ivoirien et ghanéen liés par tant de choses ! Oui l’heure est grave !
L’Intelligent d’Abidjan