Dans le bras de fer qui l’oppose, depuis mercredi dernier, à Alassane Dramane Ouattara suite à la dissolution brutale du gouvernement, le Pdci-Rda donne chaque jour, un peu plus, le sentiment de refuser le diktat de son allié du Rdr. Après les mises au point, sans ambiguïté, de son secrétaire général, Alphonse Djédjé Mady, et du président de son groupe parlementaire, Gaston Ouassénan Koné, le Pdci a remis le couvert, samedi dernier, à la faveur d’une rencontre avec le Premier ministre, Jeannot Ahoussou-Kouadio, et l’ensemble des députés du vieux parti.
Selon des sources concordantes proches du Pdci, au terme des discussions, ce sont les députés de Grand Lahou et de Katiola, Jean Djaha et Gaston Ouassénan Koné, qui ont fait connaître la position de leurs collègues, qui de toute évidence, ne semblent pas prêts à se saborder pour faire plaisir à Alassane Ouattara. « Les députés Pdci-Rda sont venus marquer leur solidarité avec Premier ministre, chef du gouvernement, qui lui-même, est député Pdci. Ainsi que les autres membres du gouvernement qui sont aussi des cadres du Pdci-Rda. Nous savons que cette décision de dissolution du gouvernement est assez forte. Mais notre souci est que nous sortions de cette situation très rapidement pour que le Parlement joue pleinement son rôle. Nous disons qu’en tant que députés Pdci-Rda, donc députés Rhdp, nous devons accompagner l’action gouvernementale, mais dans l’intérêt du peuple. L’Assemblée nationale, cette institution forte à majorité Rhdp ne saurait déstabiliser le gouvernement et le Président Alassane Ouattara. Nous devons l’accompagner, mais savoir l’accompagner dans l’intérêt du peuple. Cela est très important et c’est le sens de notre présence chez le Premier ministre Ahoussou Jeannot. C’est ce qu’il faut retenir », a-t-il confié le député Djaha un peu diplomate. Ce qui n’a pas été le cas de son aîné Ouassenan Koné dont la position fut plus tranchée. «Le Premier ministre nous a demandé de venir pour qu’on se concerte en tant que militants du Pdci-Rda. Et le groupe parlementaire est venu comme vous le voyez en très grand nombre chez le Premier ministre. Nous avons échangé. Et je crois que nous nous sommes bien compris. Nous avons même pris certaines résolutions de nous retrouver assez régulièrement entre membres du gouvernement envoyés par le Pdci-Rda et les députés du groupe Parlementaire Pdci-Rda. Avez-vous déjà vu un député qui est béni-oui-oui ? Non ! Parce que même du temps du Président Houphouët-Boigny, il y a eu des cas où les députés ont renvoyé des ministres à leurs copies en disant : non, allez revoir vos copies et revenez nous voir. Là où nous sommes, nous ne sommes pas d’accord avec vos textes. C’est pour vous dire qu’un député ne peut pas être un béni-oui-oui s’il a l’amour de son pays et de son peuple. S’il aime son pays, il doit faire son travail en toute conscience.
Sinon comment pouvez-vous accepter d’être député et devenir un béni-oui-oui ? Je dis non », a encore insisté le général Ouassénan. Une prise de position sans équivoque qui met Alassane Ouattara dans une position délicate. Désavoué publiquement, la logique veut désormais qu’il en tire toutes les conséquences et continue sa route sans ses alliés. Le Premier ministre Jeannot Ahoussou-Kouadio, qui a compris que la partie est désormais difficile, avait pratiquement un discours de fin de règne. Il a cependant fait des clarifications et des précisions. «Nous avons convié les députés à cette rencontre pour qu’ils nous écoutent. Parce que des membres du gouvernement issus du Pdci ont rencontré la direction du parti pour échanger avec elle. Je vais me faire fort avec l’autorisation du Président de l’Assemblée nationale pour rencontrer les autres groupes parlementaires dans le cadre d’une bonne relation en espérant qu’on sera reconduit pour continuer cette œuvre que nous avons commencée ensemble», a-t-il soutenu. Avant d’avouer implicitement que la crise actuelle tire sa source de ce qu’Alassane Dramane Ouattara ne connaît pas la Côte d’Ivoire. «Nous devons tous nous mettre derrière le Président de la République qui a regardé ce pays qu’il a connu en 1990 avec ses fondamentaux, comprenez que parfois il ait un peu d’impatience pour dire que j’ai envie de rendre mon pays grand». «Nous devons, nous tous, laisser la raison nous visiter pour servir la Côte d’Ivoire avec beaucoup d’amour et beaucoup d’humilité. Nous avons besoin de beaucoup d’humilité. Soyons humbles ! Ayons le triomphe modeste ! Ayons des propos modestes ! Considérons l’autre, l’adversaire même le plus haineux. Si vous venez avec amour et que vous le rencontrez, je pense qu’il va baisser dans sa haine. Reconduit ou pas, ce n’est pas ça l’essentiel. L’essentiel, c’est que les Ivoiriens se retrouvent et qu’ils soient dans la cohésion», a conclu le Premier ministre quelque peu amer.
Guillaume T. Gbato
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