Sur la photo, nous voyons les rescapés politiques du cercle restreint d’Alassane Ouattara
Le deuxième mandat d’Alassane Ouattara prend officiellement fin le 31 octobre 2020. La constitution ne lui permet pas de briguer un troisième mais il veut forcer la porte constitutionnelle. Le vide se fait alors de plus en plus autour de lui. De nombreux cadres ivoiriens qui lui avaient fait allégeance en 2010 ont démissionné de leurs postes le laissant avec son cercle restreint face à leur destin.
Quels sont les membres du cercle restreint d’Alassane Ouattara ?
En tête des fidèles parmi les plus fidèles viennent son épouse Dominique Foulleroux Ouattara et son jeune frère Téné Birahima Ouattara. Ces deux membres directs de sa famille n’ont pas le choix et voient immédiatement leur sort étroitement lié à celui du président ivoirien. Si Ouattara tombe alors ils tombent aussi avec toutes les conséquences à court et à moyen terme que cela va engendrer.
Au-delà de la famille directe, il y’a les rescapés politiques, ceux qui lui doivent tout de leur carrière.
Ce sont Hamed Bakayoko, Kandia Kamara et Adama Bictogo.
Chacune de ces personnalités n’a pu éclore que grâce à Ouattara qui les a pratiquement faites. Prenons, par exemple d’Hamed Bakayoko : Ayant obtenu le baccalauréat au Burkina Faso, il débarque à la Faculté de médecine de l’Université Houphouët-Boigny, dans les années 90. Mais ses études ne lui réussissent pas.
Ejecté de la Fac, il devient le loubard d’Alassane Ouattara, nommé en 1992 premier ministre de la Côte d’Ivoire. Hamed Bakayoko sera donc le bras droit de l’ex-fonctionnaire du Front Monétaire International pour contrôler la FESCI, le deuxième mouvement estudiantin opposé au MEECI du PDCI.
Par le biais d’Hamed Bakayoko et feu Thierry Zébié, Alassane Ouattara introduit la violence à l’université. Il croit peut-être que c’est la meilleure manière d’intimider les étudiants qui réclament de meilleures conditions de vie. A l’évidence, cette solution n’est pas la meilleure et Thierry Zébié est lynché lors d’un regroupement de contestation.
Pour se sauver, Hamed Bakayoko plonge dans l’oubli. Quand il réapparait, c’est dans le milieu artistique, où il devient un bon mécène noctambule. Il intègre aussi la Franc-maçonnerie et commence à recruter pour le compte de Ouattara. Ce lien va aussi lui permettre d’émerger en 2002, après les accords de Marcoussis. Il devint représentant de Ouattara dans le gouvernement de Laurent Gbagbo.
Quant à Kandia Camara et Adama Bictogo, leur histoire est toute simple. Respectivement d’origine guinéenne et burkinabè, ils jouent auprès de Ouattara la fibre de l’intégration sous-régionale et tirent contre les prétendues velléités de l’ivoirité. Selon eux, si Ouattara part, alors l’ivoirité ressurgira en Côte d’Ivoire.
Les personnalités qui ont sauté du bateau Ouattara
La liste des cadres du RHDP qui ont pris leur distance avec Ouattara est longue. Toutefois citons les visages les plus en vue :
Daniel Duncan : De 1992 à 2020, Daniel Duncan a été de tous les combats de Ouattara. Il fut d’abord son ministre de l’économie sous Houphouët-Boigny avant de terminer comme son vice-président. En 2020, il a démissionné de son poste, parce qu’il n’avait plus foi en Ouattara qui se montre de plus en plus omnibulé par le pouvoir d’état qu’il cherche à conserver à tout prix.
Guillaume Soro : Il n’est pas nécessaire d’épiloguer sur Guillaume Soro qui est très présent sur les réseaux sociaux et explique à tout vent pourquoi il s’oppose dorénavant à son mentor.
A peine sorti des bancs de l’université, Guillaume Soro a permis à Ouattara de former une rébellion pour chasser Laurent Gbagbo du pouvoir. Malheureusement, elle échoue et le pays est divisé en deux. Ouattara ne se voyant pas leader du nord, abandonne le projet à Soro Guillaume mais garde la main sur les relations avec les commandants de zone. Cette stratégie lui permettra d’attaquer son adversaire Laurent Gbagbo en 2011.
Battu par les hommes de Ouattara et l’armée de Sarkozy, Gbagbo est capturé et déposé à la Cour Pénale Internationale. Malheureusement pour Ouattara, Laurent Gbagbo est libéré et aucun crime n’est retenu contre lui. Le président ivoirien refuse alors de lui fournir le passeport afin de regagner la Côte d’Ivoire.
Marcel Amon Tanoh : Ce fils du sud a été très conquis aux idées de Ouattara à qui il vouait admiration et totale déférence. Il croit dans les idées de démocratie inclusive que prône l’ex-vice-président du Fonds Monétaire International. Amon Tanoh se jette alors à bras le corps dans la défense des « idéaux » de Ouattara. Il marque très vite sa démarcation avec le PDCI dans lequel milite son père. Amon Tanoh croit que Ouattara est le « messie » qui va conduire la Côte d’Ivoire de ses balbutiements vaginaux à une émergence politique et économique jamais égalée.
De 2016 à 2020, il est le ministre des affaires étrangères de la Côte d’Ivoire. Mais le 19 juillet, il annonce sur les réseaux sa démission et sa volonté de se présenter comme candidat aux prochaines présidentielles.
Il dira plus tard « j’ai quitté le RHDP et le président Ouattara après 26 ans de collaboration que je ne regrette pas sur la base de valeurs que je ne retrouvais plus dans ma famille politique ».
Ouattara très esseulé
En dépit de sa « garde très rapprochée », le cercle de Ouattara s’est rétrécit comme peau de chagrin. L’homme est aussi bien isolé sur le plan national qu’international. En Côte d’Ivoire, ses alliés d’hier Guillaume Soro, Konan Bédié et Mabri Toikeuse l’ont abandonné.
Sur la scène internationale, la France, les Etats-Unis et l’Union Européenne qui l’ont porté au pouvoir en 2020 ne se reconnaissent plus en lui, vu sa détermination à vouloir briguer un troisième anticonstitutionnel qui fait peser sur la Côte d’Ivoire le spectre d’une autre guerre endogène après celle de 2011.
Par Serge Atteby
Lire aussi: La France change d’ambassadeur avant les élections en Côte d’Ivoire