Le numéro un rwandais a profité de l’Assemblée générale des Nations unies pour «taper» sur l’institution internationale à caractère judiciaire qui «a fait preuve de préjugés à l’égard des Africains». Si l’affaire kényane est systématiquement évoquée, c’est bel et bien l’affaire Gbagbo qui a été le catalyseur de l’actuelle grogne africaine.
Pour une fois, un certain consensus africain semble se dessiner. Et le sujet de convergence semble être la Cour pénale internationale (CPI), dont l’attitude n’est plus supportée par les pays du continent. Mercredi dernier, c’est le président rwandais Paul Kagame qui est monté au créneau contre cette institution, après un certain nombre de ses homologues. «Soutenir le consensus global contre l’impunité et créer une justice internationale pour la combattre, nous l’avons fait, en pensant qu’un tel système favoriserait la paix et la sécurité entre les nations. La Cour pénale internationale a violé ces principes», a-t-il vertement accusé. «La CPI a fait preuve de préjugés à l’égard des Africains. Au lieu de promouvoir la justice et la paix, elle a négligé les efforts de réconciliation en humiliant les Africains et leurs leaders pour servir les intérêts politiques des puissants. Les procès en cours contre le président et le vice-président kényans le démontrent comme une évidence. Les leaders kényans ont montré leur détermination à rompre avec les erreurs du passé en réconciliant les communautés, pour aller de l’avant, c’est ce qui explique que les citoyens kényans ont voté pour eux», a-t-il poursuivi. Avant d’aborder un problème de fond de notre temps : «Les Nations unies et le Conseil de sécurité doivent étudier cette situation mais également la question plus large de la compétence universelle.» Les récriminations contre la CPI ne cessent de pleuvoir en provenance des pays membres de l’Union africaine. Dans ce contexte, Alassane Ouattara, qui a tout mis en œuvre pour y traduire le président Laurent Gbagbo, apparaît comme un «mouton noir», et sa marge d’action diplomatique se réduittant on le voit plus que jamais comme un homme des Occidentaux. Dans le même temps, la diaspora africaine ne faiblit pas. La pétition du Mouvement des Africain-Français, dirigé par l’écrivaine Calixthe Beyala, continue d’enregistrer des signatures. «Compte tenu des nobles objectifs affichés de la CPI, le plus curieux, c’est que parmi la trentaine de personnes inculpées par la CPI depuis sa création jusqu’à ce jour, dont une petite dizaine sont actuellement détenus à la CPI, il n’y a que des Africains, alors qu’en plus des deux dernières guerres mondiales, les guerres récentes en Irak, en Afghanistan, en Côte d’Ivoire et en Libye confirment l’accusation portée contre l’Europe par Aimée Césaire dans son ‘‘Discours sur le colonialisme’’ et que nous pouvons actualiser en disant que ‘‘l’Occident est comptable devant la communauté humaine du plus grand tas de cadavres de l’histoire’’», relève le Mouvement es Africains français. Qui continue de s’insurger contre le fait que le président Laurent Gbagbo est toujours détenu à la Haye, alors qu’il n’y aucune et/ou insuffisance de preuves contre lui. «Nous estimons que cette situation présente de la CPI est d’autant plus inacceptable qu’en plus du mépris de la souveraineté des Etats africains à la faveur de l’ingérence politique et humanitaire occidentale dans les affaires intérieures africaines qu’ont déjà refusé les Etats asiatiques, il s’agit là d’une humiliation supplémentaire des Africains à la face du monde», dénonce le Mouvement des Africains-français (Maf). Qui espère que les dirigeants africains auront le courage, comme le Kenya, de franchir le Rubicon et se retirer de la CPI, qualifié de véritable «camp de concentration pour Africains» par l’avocat sénégalais Me Khoureissy Ba. Si le cas kenyan alimente les remontrances des signataires, c’est bel et bien l’injustice dont était victime le président Laurent Gbagbo qui a bien été en réalité, l’élément déclencheur de la fronde des dirigeants africains. Les incohérences et la légèreté qui sous-tendait le dossier ivoirien ont révolté plus d’un dirigeant africain. Qui ont vite fait de saisir le cas kényan, où les deux têtes de l’Exécutif dans ce pays sont poursuivies par la CPI. A cet effet, un sommet spécial dont l’ordre du jour est consacré à un «retrait en masse » des pays africains de la Cpi, est prévu pour se tenir le 13 octobre prochain au siège de l’Ua à Addis-Abeba (Ethiopie). Affaire
Avec Le Nouveau Courrier