Est-il nécessaire de rappeler l’épreuve terrifiante, dont les cendres sont encore brûlantes, que la Côte d’Ivoire a subie depuis la mort de Félix Houphouët Boigny, avec ses lots de mensonges, de manipulations et de crimes odieux ? La connerie humaine qui animait les acteurs de cette période triste et sombre n’a rendu service à personne, sinon une grande perdante : la Côte d’Ivoire. Aujourd’hui, la Côte d’Ivoire est dotée d’un nouveau pouvoir et il faut maintenant soigner les plaies béantes de plusieurs années.
La volonté du nouveau pouvoir de rendre la justice est une priorité selon les déclarations publiques des responsables. Il serait difficile d’obtenir une réconciliation parfaite sans au préalable la justice et le pardon. Le Président ivoirien s’y est engagé, très récemment, l’ex- président déchu a été inculpé pour crime économique par la justice ivoirienne. Les Ivoiriens n’ont aucune raison de ne pas croire en sa justice dont les pouvoirs publics doivent garantir l’indépendance. Le Président de la République a toujours dit haut et fort : « l’impunité, c’est fini. » Il confirme ainsi la logique de la République. Le peuple de Côte d’Ivoire doit s’engouffrer dans cette voie en s’y impliquant fortement afin que cela devienne une réalité.
Il est temps que notre pays montre à la face du monde sa capacité de maîtriser toutes les affaires de la nation quelque soit la gravité de la situation. La Côte d’Ivoire doit être en mesure de juger n’importe quel Ivoirien sans passer par une institution étrangère aux règles de notre justice. Tous les Ivoiriens sont conscients des faits graves qu’ils reprochent aux responsables politiques depuis la mort de Félix Houphouët Boigny.
La décision d’Abidjan de faire juger l’ex-chef d’Etat par le tribunal pénal international pour le volet crime de sang va-t-elle grandir la Côte d’Ivoire ? On peut comprendre le souci de transparence qu’évoquent les hauts responsables politiques ivoiriens, mais rendent-ils service à notre justice en renvoyant le Président déchu devant une juridiction internationale ? Cela n’est-il pas une humiliation pour nos tribunaux.
Saura-t-on un jour conduire la Côte d’Ivoire à une réelle autonomie ? A cette question, tous Ivoiriens, et le chef de l’Etat en premier, doivent répondre par un oui sans équivoque. La Côte d’Ivoire a l’obligation de doter sa justice de grands moyens humains et financiers afin qu’elle devienne responsable, indépendante, transparente et efficace.
Ceci n’est pas un message de soutien à l’ex-Président déchu, loin de là, plutôt le souci d’accorder une crédibilité à la justice ivoirienne. Il serait souhaitable et noble qu’Abidjan revienne sur sa décision de faire juger l’ex-Président au TPI. Cela va de la vraie souveraineté de notre cher pays.
Ibrahim DOUMBIA
Auteur de VISA POUR LE FROID
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