LES GRECS ONT DIT « NON » A LA POLITIQUE D’AUSTERITE IMPOSEE AU PAYS PAR LE FONDAMENTALISME LIBERAL
Le « non » l’a emporté en Grèce à l’occasion du référendum proposé par le gouvernement et validé par le parlement.
La question posée était simple et donc on ne peut plus claire : « faut-il accepter le Plan d’Accord soumis par la Commission Européenne, la BCE et le FMI lors de l’Euro groupe du 25 juin ? »
La réponse des grecs a été aussi simple que claire: Non.
QUE RECOUVRAIT CONCRETEMENT CETTE QUESTION ?
La question posée aux grecs portait sur l’acceptation (le « oui ») ou le refus (le « non ») de nouvelles mesures d’austérité portant sur l’augmentation des impôts et la baisse des dépenses publiques dans les secteurs tels que la retraite, la santé, l’éducation entre autres, pour que le pays puisse accéder à de nouveaux crédits.
QUEL ETAIT DONC L’ENJEU DE CETTE CONSULTATION POUR LE GOUVERNEMENT GREC ?
Par cette consultation le gouvernement grec entend placer le peuple face à ses responsabilités historiques et de fait conforte sa position face à ses partenaires européens dans le cadre des négociations en cours.
QUELLE EST LA REALITE DE LA DETTE GRECQUE ?
La dette grecque en valeur absolue est de 314 milliards d’euros soit environ 177 % du Produit Intérieur Brut actuellement. Ce pourcentage traduit une augmentation de l’ordre 20% entre 2010 et 2015. Ce qui en apparence laisse supposer qu’il y a une spirale dans le processus d’endettement du pays. En réalité, cette augmentation est plutôt due à un recul du PIB qui est le résultat direct de la politique de rigueur en cours dans le pays depuis quelques années.
Contrairement à ce qui est avancé par bon nombre de confrères économistes dans les medias, cette dette est majoritairement détenue par les Etats et non les partenaires privés. La Grèce n’est ainsi endettée vis-à-vis du FMI qu’à hauteur de 23 milliards et du secteur privé que 31 milliards.
LE RENONCEMENT A UNE PARTIE DE LA DETTE POURRAIT-IL AFFECTE DE FAÇON SIGNIFICATIVE LES ECONOMIES DE L’EURO-ZONE ?
Pas vraiment dans la mesure où la Grèce ne représente que 2% de la richesse de la zone. Ce qui est plutôt redouté, c’est la valeur pédagogique que cela induirait de façon inéluctable chez certains partenaires de l’euro zone en termes de « pouvoir de négociation » au sens perroussien du terme.
QUELLE PERSPECTIVE POUR LA GRECE ?
De toutes les façons, que la réponse ait été oui ou non, il est clair qu’il y aurait toujours eu un accord. La différence par contre se situe dans les termes de cet accord. En votant non de façon aussi écrasante (61% pour le NON), les Grecs placent leur gouvernement en position d’obtenir des concessions substantielles de la part de ses partenaires et de fait permet à ce gouvernement de faire accepter de nombreux axes de ses propositions qui sont centrées sur une régulation économique fondée sur le principe de la relance par la demande. La démission du ministre des finances profondément keynésianiste voire kénésien s’inscrit d’ailleurs dans cette même perspective. Elle permet à certains responsables européens acquis aux principes du monétarisme fondamentaliste, parties prenantes dans les négociations de sauver la face.
QUEL SERAIT L’IMPACT D’UNE ANNULATION DE LA DETTE GRECQUE SUR LE PORTEFEUILLE DU CONTRIBUABLE FRANÇAIS ?
On entend dire dans le medias que cela couterait 735 euros à chaque contribuable français. Cela n’est pas vrai. Cela n’est pas vrai parce que la France est engagée à hauteur de 40 milliards d’euros. Sur ces 40 milliards une partie, soit 10 milliards, est constituée de prêts bilatéraux. Le reste relève de garantie au Fonds Européen de Solidarité Financière.
Dans tous les configurations d’évaluation ces prêts ne viendraient pas grever la dette publique française puisse ces fonds sont déjà intégrés à ce titre. Leur annulation n’augmenterait donc pas la dette.
IL FAUDRAIT TOUT DE MEME QUE LA FRANCE DONC LE CONTRIBUABLE FRANÇAIS REMBOURSE
En cas d’annulation de la dette grecque le contribuable français n’aurait pas à payer grand chose, tout comme d’ailleurs le contribuable allemand, car il faut savoir que lorsqu’un emprunt vient à échéance, les pays comme la France remboursent en empruntant de nouveau. On dit qu’ils font « rouler leur dette », une technique éprouvée mais ô combien complexe à expliquer en quelques mots ici. Une chose est certaine, le contribuable français n’aurait qu’à rembourser les intérêts actuellement versés par la Grèce soit 15 euros par français en cas d’annulation de cette dette. Autant dire une goutte d’eau dans la mer.
QUELLE LEÇON POUR L’AFRIQUE NOIRE ENDETTEE ?
La leçon pour l’Afrique dépasse le cadre économique et de fait celui du processus d’endettement induit par le FMI et la BM depuis le début des années 80.
Désormais on peut parler de « Méthode grecque » tant la leçon à tirer de la démarche est riche en enseignements et donc pédagogique.
Quand un gouvernement se retrouve dans une situation où sa marge de manœuvre est extrêmement réduite, il n’y a pas de meilleure issue que de recourir au peuple. C’est le sens même de l’option référendum que prévoient bon nombre de constitutions.
La leçon est donc plus vaste que cela. Elle s’inscrit dans la dynamique globale de la « démocratie » qu’on a trop tendance à réduire au seul champ d’expression sur des questions politiques au sens classique du terme.
Dr. Dadié Attébi