En Ethiopie, où 85% des femmes accouchent à domicile, souvent sans avoir bénéficié d’aucun suivi médical pendant leur grossesse, une application mobile permet désormais aux sages-femmes de connaître les procédures d’urgence en cas de complication et de réduire les risques de mortalité en couches.
Baptisée « Safe Delivery App » (« Application Accouchement sans risque »), l’appli développée par l’ONG danoise Maternity Foundation permet de visionner sur téléphone portable ou sur tablette électronique des petits films d’animation et des instructions pour parer aux situations d’urgence: hémorragies, complications dans la délivrance du placenta, réanimation du nouveau-né, infections.
« Les sages-femmes ont des compétences et du savoir-faire, mais elles n’appliquent pas forcément la bonne procédure quand des complications surviennent, même bénignes », explique Mesfin Wondafrash, le responsable de Maternity Foundation en Ethiopie.
Dans les zones rurales, les Ethiopiennes n’ont le plus souvent d’autre aide pour accoucher que celle d’un membre de la famille ou de matrones traditionnelles sans autre formation que leur expérience personnelle.
« Les femmes enceintes attendent à la maison et en cas de complication, comme un saignement, il est parfois trop tard pour se rendre dans un centre de soins », ajoute-t-il.
« Safe Delivery App » a été testé pendant un an à Gimbie, une localité à 450 km d’Addis Abeba dans la région oromo. La fondation a distribué 78 téléphones portables équipés de l’application à des sages-femmes. Et les résultats à partir de cet échantillon sont prometteurs, avec des capacités de réaction efficace triplées dans certaines situations.
« Au bout d’un an, la capacité des utilisateurs à faire face à une hémorragie est passée de 20 à 60%, et de 30 à 70% pour la réanimation d’un nouveau-né. Si tous les personnels de santé pouvaient utiliser cette application, les accouchements seraient moins risqués », assure Mesfin Wondafrash.
Chaque année, 289.000 femmes et 5 millions de bébés meurent dans le monde des suites de complications liées à un accouchement, selon l’association. La quasi-totalité des décès ont lieu dans des pays à faible revenu comme l’Ethiopie.
Maternity Foundation entend profiter de la forte augmentation des utilisateurs de téléphones portables en Afrique – un continent où la faiblesse des infrastructures en téléphonie fixe incite au développement du mobile – pour étendre le déploiement de l’application.
« Une application mobile est plus facile à comprendre et plus facile d’accès qu’un livre médical et peut aisément être mise à jour. Safe Delivery App permet de surmonter une des principales causes de mortalité: le manque de formation dans l’aide à l’accouchement. Et nous pouvons atteindre des personnels de santé dans zones difficiles d’accès, » se félicite la présidente de Maternity Foundation, Anna Frellsen.
Outre l’Ethiopie, « Safe Delivery App » est également testée au Ghana et devrait bientôt être déployée en Tanzanie, en Guinée et dans plusieurs pays d’Afrique francophone avec l’objectif d’atteindre 10.000 personnels de santé d’ici 2017.
« Si nous y parvenons, nous aurons assuré un accouchement plus sûr à environ 1 million de femmes », se réjouit Anna Frellsen.
L’ONG Maternity Foundation, qui a pour devise « aucune femme ne devrait mourir en donnant la vie » et pour patronne la princesse Mary du Danemark, fête en 2015 ses dix ans et recevra fin novembre le prix des droits de l’Homme de l’Ambassade de France, créé par l’ambassadeur de France à Copenhague, François Zimeray. Ce prix a été remis pour la première fois en 2014 à une ONG danoise de soutien aux victimes de la torture, Dignity.
Angop