La question des droits de l’homme en Côte d’Ivoire.
S’interrogeant sur la nécessité de mettre en avant la question fondamentale des Droits de l’Homme cher à chaque Ivoirien, il m’appartient de partager avec vous les réflexions profondes capables de modifier notre positionnement sur cette question.
La question des droits de l’homme tel qu’elle nous paraissait en Côte d’ivoire avant et pendant la crise post électorale nous interpelle sur son sens, sa portée, sur ses enjeux, et enfin sur la responsabilité de chacun d’entre nous.
La première signification des droits de l’homme, c’est tout simplement l’élaboration de règles visant à protéger le corps et l’âme de chacun d’entre nous. Ces règles doivent être respectées quelque soit son appartenance religieuse, politique, ou sociale .
Concernant sa portée nous observons sur la question des Droits de l’homme, des divisions quant à sa notion, sa compréhension et son contenu. Il est indubitable de constater qu’on assiste aujourd’hui à une montée fulgurante d’un relativisme culturel des droits de l’homme. Relativisme culturel qui jette un discrédit sur ces droits tel que dans la compréhension occidentale. la notion des droits de l’homme telle qu’elle est définie par les sociétés occidentales n’est pas fidèle à leur concrétisation dans les société africaines. Il convient de souligner qu’on ne saurait parler des droits de l’homme dans leur réalité sans convoquer leur encrage dans la dimension socioculturelle dans la société africaine. Concrètement, invoquer les Droits de l’homme c’est les mettre en relation avec ce qui est au cœur des pratiques culturelles ayant un sens propre à un groupe culturel défini. Nous voulons simplement dire qu’elle ne peut être affranchie des réalités culturelles.
Le dire ne revient pas à remettre en question le principe des droits de l’homme devenu universel. Le dire c’est tout simplement inviter tous les acteurs des droits de l’homme à situer les droits de l’homme dans le contexte socioculturel auquel les droits de l’homme sont appliqués. L’universalité des droits de l’homme ne se situerait plus dans ce qui est pareil à tous, mais plutôt à ce que nous partageons tous, mais qui se décrit dans des modalités différentes. Ce n’est qu’en mettant le curseur sur cet angle qu’on peut éradiquer le relativisme culturel qui frappe durement les droits de l’homme aujourd’hui.
LES ENJEUX A L’ECHELLE DE CHAQUE INDIVIDU.
Au-delà des clivages politiques, au-delà des clivages idéologiques, au delà de notre culture, enfin au delà des divisions de classes, nous avons tous une responsabilité face au respect des Droits de l’Homme.
Cet être humain qui est bafoué dans ces droits, à qui nous nions les droits et à qui nous décidons au nom d’une certaine idéologie, au non d’une culture parfois mal interprétée, d’inférioriser, d’avilir, de chosifier, de déshumaniser, de tuer . Cet être humain c’est nous, c’est vous, ce sont nos enfants, nos petits enfants. Comprendre cela, c’est comprendre l’humanité toute entière.
En tant que tel, nous sommes tous responsables de ce trésor qui nous est cher et qui nous rend tous égaux en tant qu’humain. Nous sommes tous responsables de cette femme, de cet homme, de cet enfant qu’on envoie en guerre. Nous sommes responsables de cet enfant déscolarisé. Nous sommes responsables de ces femmes qui sont battues, violées et qui sont tuées avec la complicité de notre indifférence. Nous sommes responsables de ces hommes qui fuient leur patrie en quête d’asile ou qui perdent leur vie chaque jour parfois dans l’ombre, au nom de la liberté. Vu ainsi, nul n’a le droit de se dérober sous un quelconque motif que ce soit. La question des droits de l’homme ne saurait être la responsabilité des uns et une curiosité pour les autres.
-LES ENJEUX A L’ECHELLE DES AFRICAINS.
La question des Droits de l’Homme n’est pas une problématique propre aux pays occidentaux. Avec un passé tumultueux ponctué de nombreuses guerres et de conflits, l’occident, précisément les occidentaux se sont lancés préventivement dans la promotion des Droits de l’Homme; afin d’éviter d’éventuelles récidives de guerre en Occident. et de manière plus large, dans un humanisme, empêchant d’éventuelles violations des Droits, dont les causes ne seraient pas fonction de son appartenance géographique, ni de sa religion, encore moins de son genre. Cette posture a permis aux défenseurs des Droits de l’Homme d’avoir une grande visibilité, maintenant ainsi une vigilance accrue et permanente sur l’humanité. La visibilité des occidentaux en temps que Défenseurs des Droits de l’Homme ainsi que leur passé de colonisateur assorti de leur titre de puissance nucléaire, jouissant de tous pouvoirs dans les plus hautes instances internationales, ajoutée à un faisceau d’éléments de nature socioculturelle et historique nous auraient éloigné, nous Africains de la promotion des Droits de l’Homme à l’échelle internationale. Certes il est indiscutable que les africains sont restés, sensibles dans la pratique aux questions des Droits de l’Homme, à titre d’ exemple la question du développement durable , notamment en matière de protection de l’environnement est au cœur des préoccupations mondiales aujourd’hui a été traduite concrète en Afrique. Il suffit d’ interroger le taux de pollution des villes et villages africains. Nos pratiques traditionnelles quotidiennes nous ont préservé dans une certaine mesure de la pollution. On peut par ailleurs citer l’ attachement fondamental qu’ont les africains concernant la préservation de la vie. De la période avant la naissance, où l’ individu qui arrive au monde est déjà protégés par des droits qui interdissent l’ avortement, jusqu’aux personnes âgées qui bénéficient d’ une place considérable dans la société africaine. Ces quelques exemples sortent d’un long chapelet d’exemples qui peuvent être aujourd’hui considérés comme des acquis que nous préservons jalousement.
-LES ENJEUX A L’ECHELLE INTERNATIONALE.
Si l’on se place à l’ échelle internationale, l’on ne peut se soustraire du constat suivant : « les africains sont absents dans la promotion et la défense des Droits de l’Homme ». Une telle remarque est contradictoire, par le simple fait que la visibilité des défenseurs africains des Droits de l’Homme tiendrait plus du fait que ces derniers sont minoritaires dans un océan de défenseurs des Droits de l’Homme constitués majoritairement d’ occidentaux, ou les africains brillent encore par leur absence. Aujourd’hui il est indispensable que nous, africains, nous sortions de la logique qui s’apparente au fait que nous nous défilons sur les questions qui touchent intrinsèquement l’ humain à l’ échelle internationale. Nous devons cesser de réagir aux conséquences qui affectent l’ homme et nous inscrire dans l’ action, afin d’ éviter tous ce qui pourrait avilir l’ homme. Nous faisons partie de l’humanité. Notre mutisme et notre enfermement à l’égard de la question de la promotion des Droits de l’Homme nous porte plus préjudice. Continuer à pratiquer la politique du « désintéressé, de l’absent » c’est envoyer volontairement le signe selon lequel le monde se limite à notre espace environnemental et que nous baignons dans une situation idoine dépouillée de toutes entraves des Droits de l’Homme, ce qui est une hérésie. Promouvoir les Droits de l’Homme c’ est apporter notre contribution à la construction de l’ édifice qu’est l’ humanité. Les pays du Sud , notamment les pays africains font l’ objet d’ une attention accrue en matière des Droits de l’Homme. En tant que sujets suscitant la préoccupation, nous devons aujourd’hui nous positionner comme des vrais acteurs dans la promotion des Droits de l’ Homme, afin d’ impulser une réelle dynamique dans l’ éducation aux Droits de l’ Homme au sein des populations.
Les enjeux sont tels qu’on ne peut plus porter le voile de l’indifférence, les africains sont dans le monde par conséquent il est de notre responsabilité de veiller à la protection de l’humain, c’est aussi l’affaire des africains. Ceux qui ne défendent pas les Droits de l’Homme sont les vrais coupables par leur silence et complice de ceux qui les violent.
-LES ENJEUX A L’ECHELLE DES GROUPEMENTS D’INDIVIDUS
L’ampleur de la violation des Droits de l’Homme nécessite aujourd’hui l’implication des acteurs de toute nature. Parmi les acteurs interpellés, les groupements d’individus (Partis politiques, associations, ONG….) s’ illustrent parmi les principaux acteurs qui partagent une certaine proximité avec les populations, bénéficiant par ce biais d’une certaine crédibilité. Cette position dont bénéficient cette catégorie d’ acteurs, leur donne un avantage par rapport aux autres. Cet avantage ne saurait se réduire uniquement à leurs objectifs structurels. Les groupements d’ individus ne sauraient aujourd’hui prétexter les objectifs qu’ils se sont fixés, pour s’affranchir de la responsabilité qui incombe autant aux personnes morales qu’aux personnes physiques. Les mutations actuelles ont changé la configuration des responsabilités au niveau mondial. La protection de l’ être humain n ‘est plus l’apanage des acteurs traditionnels que sont les Etats, les organisations internationales. La promotion des Droits de l’Homme aurait un réel écho auprès des populations que si les acteurs qui sont en contact permanent avec les populations s’en approprient. Cette invitation est aussi une vitrine pour ces acteurs d’agrandir leur visibilité, l’enjeu est non négligeable.
Lyon le 30 septembre 2014.
Erick TRAORE.
Porte parole des Secrétaires Généraux des Sections FPI France.
fpilyon@hotmail.fr
By: TRAORE Erick