DISCOURS SUR LE COLONIALISME -1950
Entre colonisateur et colonisé, il n’y a de place que pour la corvée, l’intimmidation, la pression, la police, l’impôt, le vol, le viol, les cultures obligatoires, le mépris, la méfiance, la morgue, la suffisance, la muflerie, des élites décérébrées, des masses avilies.
Aucun contact humain, mais des rapports de domination et de soumission qui transforme l’homme colonisateur en pion, en adjudant, en garde-chiourme, en chicote et l’homme indigène en instrument de production.
A mon tour de poser une équation : colonisation=chosification.
J’entends la tempête. On me parle de progrès, de « réalisations », de maladies guéries, de niveaux de vie élevés au-dessus d’eux mêmes.
Moi, je parle de sociétés vidées d’elles-mêmes, de cultures piétinées, d’institutions minées, de terres confisquées, de religions assassinées, d’extraordinaires possibilités supprimées. On me lance à la tête des faits, des statistiques, des kilométrages de routesdes canaux, des chemins de fer.
Moi, je parle de milliers d’hommes scrifiés au Congo-Océan. Je parle de ceux qui, à l’heure où j’écris, sont en train de creuser à la main le port d’Abidjan. Je parle de millions d’hommes arrachés à leurs terres, à leurs habitudes, à leurs vies, à la vie, à la danse, à la sagesse.
Je parle de millions d’hommes à qui on a inculqué savamment la peur, le complexe d’infériorité, le tremblement, l’agenouillement, le désespoir, le larbinisme.
On m’en donne plein la vue de tonnage de coton ou de cacao exporté, d’hectares d’oliviers ou de vignes plantés.
Moi je parle (…) (p. 23-24)
…L’Europe colonisatrice est déloyale à légitimer à postériori l’action colonisatrice par les évidents progrès matériels réalisés dans certains domaines sous le régime colonial attendu que (…) NUL NE SAIT A QUEL STADE DE DEVELOPPEMENT MATERIEL EUSSENT ETE CES MEMES PAYS SANS L’INTERVENTION EUROPEENNE. (p. 27)
Aimé CESAIRE.
« Le jour où Nicolas Sarkozy, président de la république française faisait bombarder le palais présidentiel de SEM Laurent GBAGBO, président élu reconnu par la cour constitutionnelle de Côte d’Ivoire, en vue de réliser son coup d’état, il rendait au panthéon un hommage de la nation française à Aimé Césaire. pour cette hommage hypocrite, la famille du « Chantre » de la négritude ne lui autorisa que la pose d’une plaque commémorative.
La dépouille d’Aimé Césaire, que la France voulait installer dans son panthéon, repose comme à sa demande dans sa Martinique natale qu’il a tant aimée. »
By: Annick