La crise politique en République démocratique du Congo a connu dimanche un nouvel épisode sanglant avec au moins cinq morts à Kinshasa dans la dispersion par les forces de sécurité de marches interdites contre le maintien au pouvoir du président Joseph Kabila.
Au moins 33 personnes ont été blessées dans tout le pays lors de ces « marches pacifiques » organisées à l’appel d’un collectif catholique après les messes du dimanche, selon ce bilan provisoire de la Mission des Nations unies au Congo (Monusco).
Les décès ont tous été comptabilisés à Kinshasa, alors que des blessés et des arrestations ont été relevés dans tout le pays, a-t-elle dit.
Les forces de sécurité ont utilisé des gaz lacrymogènes mais aussi des balles réelles, selon la Monusco, qui avait annoncé l’envoi d’observateurs sur le terrain, et des témoins dont des journalistes de l’AFP.
A Kinshasa, une jeune fille de 16 ans est décédée après un tir de rafales d’une « auto-mitrailleuse » visant l’entrée de l’église Saint-François-de-Salles dans la commune de Kitambo, a déclaré à l’AFP le médecin, ex-ministre et opposant Jean-Baptise Sondji.
Le décès a été confirmé à l’AFP par le père de la jeune fille qui dit être officier de police.
D’importantes forces de l’ordre ont aussi été déployées dans les principales villes congolaises où internet a été coupé dans la nuit.
Les autorités congolaises avaient une nouvelle fois interdit les marches à l’appel du collectif qui avait organisé une initiative similaire le 31 décembre dernier pour réclamer au président Kabila de déclarer publiquement qu’il ne briguera pas un troisième mandat, ce qui lui interdit la Constitution.
Son deuxième et dernier mandat a pris le 20 décembre 2016 et des élections ne sont maintenant prévues que le 23 décembre 2018.
La répression du 31 décembre avait fait six morts dont cinq à Kinshasa, selon l’ONU et la nonciature apostolique, aucun d’après les autorités.
Depuis, l’Eglise catholique a durci sa position contre le régime du président Kabila au pouvoir depuis 2101, dénonçant la « barbarie » de la répression et demandant « que les médiocres dégagent ».
Sur le terrain, les marcheurs ont opposé plus de résistances aux policiers armés que le 31 décembre, a constaté l’AFP.
Dans le centre de Kinshasa après la messe, plusieurs centaines de personnes avec des rameaux et des bibles ont marché sur deux kilomètres entre la paroisse Christ-Roi vers la place victoire avant de se heurter aux forces de l’ordre.
– « Maman Marie vient sauver le pays » –
Les marcheurs portaient des crucifix et des chapelets et chantaient en lingala « Maman Marie, viens sauver le pays ». Des curés et un des leaders de l’opposition, Vital Kamerhe, avaient pris la tête du cortège.
D’abord inactive, la police a tiré des gaz lacrymogènes, auxquels les manifestants ont répondu par des jets de pierre, a constaté un journaliste de l’AFP.
Dans une paroisse voisine, à Saint-Joseph, au moins 16 personnes ont été blessées, dont quatre grièvement, parmi lesquelles deux par balle, a indiqué à l’AFP une infirmière du centre médical Mgr Léonard, près de l’église Saint-Joseph, dans une autre commune populaire de Kinshasa.
Dans les provinces, la Monusco a dénoncé 24 « arrestations arbitraitres » de membres du collectif citoyen Lutte pour le changement (Lucha) dans l’Est, à Beni, dans le Nord-Kivu.
Onze personnes ont été blessées à Kisangani (nord-est), selon la même source. Dans cette ville, des jeunes ont tenté de résister aux forces de sécurité en brûlant des pneus dans le centre, selon un correspondant de l’AFP. Des marches ont tenté de se reconstituer après leur dispersion, selon un autre correspondant de l’AFP.
A Goma, dans l’est, des fidèles ont également été dispersés par la police à coup de gaz lacrymogènes en sortant de la cathédrale, selon un correspondant de l’AFP. A Beni, la Monusco a dénoncé l’arrestation « arbitraire » de 24 membres du mouvement citoyen Lutte pour le changement (Lucha).
La RDC interdit toute manifestation depuis les journées sanglantes de septembre 2016, juste avant l’expiration du deuxième et dernier mandat du président Kabila le 20 décembre 2016.
bmb-st/jlb/sba AFP