A Daoukro, le 17 septembre 2014, de façon autoritaire, unilatérale, sans avis du Bureau politique ni du secrétariat exécutif, ni d’aucune autre instance du Pdci-Rda, Henri Konan Bédié vient d’offrir tout le parti d’Houphouët-Boigny à Alassane Ouattara du Rdr : «Devant la nation rassemblée, sans détour, sans trahir les décisions du 12e congrès du Pdci, je donne des orientations fermes pour soutenir ta candidature à l’élection présidentielle 2015. » Et Bédié de se montrer encore plus déterminé : « Je demande à toutes les structures du Pdci-Rda et des partis composant le Rhdp de se mettre en mouvement pour faire aboutir ce projet. Tu seras ainsi le candidat unique de ces partis politiques pour l’élection présidentielle». Et il annonce la liquidation complète du parti d’Houphouët en ces termes : « L’objectif d’une telle candidature est double. D’abord à assurer le succès du Rhdp aux élections de 2015 dans l’intérêt de la Côte d’Ivoire et de la paix. Et ensuite, aboutir à un parti unifié, dénommé Pdci-Rdr pour aider la Côte d’Ivoire… » Voilà l’acte de « vente » et de liquidation du Pdci-Rda. Mais quelles sont les vraies motivations d’Henri Konan Bédié à se comporter de la sorte ? Il faut d’abord comprendre que cet homme n’a plus de carrière politique à préserver. Compte tenu de son âge avancé, il ne peut plus se présenter à la présidentielle. Tout ce qui lui reste, c’est donc de monnayer sa position et ce qu’il conserve comme atouts pour s’assurer une retraite dorée et mettre sa famille à l’abri du besoin. De ce point de vue, le Pdci est une mine d’or entre ses mains, qu’il vend le plus cher possible. Et pour que Bédié fasse un tel saut à Daoukro, il a fallu certainement que Ouattara lui ait offert le maximum d’assurance et une contrepartie bien substantielle, en termes de douceurs de la vie. Par exemple un revenu mensuel évalué en plusieurs millions par mois, des positions enviables de ses enfants et hommes de main dans l’administration Ouattara, une subvention étatique au profit de Servir, l’Ong de son épouse, Henriette Bédié, etc. Dès lors que Ouattara remplit ces conditions, pourquoi voudrait-on qu’il pense à l’avenir du Pdci et des cadres de ce parti ? Ensuite, Bédié agit ainsi également parce qu’il a un environnement favorable. Le Pdci est différent du Fpi dont les militants peuvent mettre en minorité le président et lui imposer leur ligne. Au Pdci, on se trouve dans un royaume akan, avec un esprit grégaire. Si Bédié se permet de prendre une telle décision, « livrer le Pdci au Rdr » et promettre de la faire valider par la prochaine Convention de son parti, il le dit à la lumière des mentalités des militants de ce parti dans leur ensemble. Cela signifie que la masse de ses partisans est comparable à un band de poissons. Avec un coefficient intellectuel de l’ordre de 6 sur l’échelle des coefficients intellectuels, elle fonctionne complètement de façon grégaire. De façon conformiste, elle suit son leader. Dans ces conditions, le pouvoir n’a pas de mal, comme un pêcheur qui a un filet, à réguler ce band de poissons pour l’amener à lui, une fois qu’il a rallié ce leader qui ne cherche qu’à être courtisé. Bédié mise sur le comportement suiviste de bien de militants de son parti pour se porter à des extrémités. Un chef qui annonce solennellement une importante décision et promet de la faire adopter par la Convention de son parti, est persuadé que l’exemple des militants du Fpi, qui ont le dernier, ne peut pas faire des émules au sein de sa formation. Enfin, il y a des barrons au Pdci qui ne sont pas d’accord avec Bédié dans son allégeance dommageable à leur parti à Ouattara. Mais au lieu de monter au créneau et crier holà, « trop, c’est trop », ils se terrent, laissant les seuls Kkb se débattre. On ne sait plus ce que deviennent les Djédjé Mady et autres. Bédié est conscient de tout cela et en profite pour conforter sa position. Le débat sur sa reconduction à la tête du Pdci-Rda, alors que son âge crépusculaire ne le permettait plus, et sa victoire relativement à la contestation, tout cela lui a servi de test. Ayant gagné l’impossible, il ne reste plus qu’à dérouler la loi du vainqueur : faire de Ouattara le candidat unique du Rhdp à la présidentielle 2015, mettre le Pdci sous l’éteignoir et créer un parti unifié « dénommé Pdci-Rdr ». Que peut faire encore Bédié plus que cela pour que le Pdci se réveille ? Derrière le déluge de compliments de Ouattara à son endroit à Daoukro, Bédié ne peut qu’avoir assuré sa vie, ses arrières. Il appartient maintenant aux cadres de Pdci d’en tirer les conséquences. Et personne ne mènera ce combat à leur place.
Germain Séhoué
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IN LE TEMPS DU 19 SEPT 2014