(Reuters) – La France hésite à inclure Laurent Gbagbo sur la liste de responsables ivoiriens passibles d’interdiction de visas et de gel de leurs avoirs en cours de constitution à Bruxelles, ont indiqué jeudi plusieurs sources diplomatiques européennes au fait du dossier.
Paris souhaite conserver une carte dans son jeu pour faire face à une dégradation de la situation mais une très large majorité des Vingt-Sept sont d’avis de viser sans attendre le président ivoirien sortant, ont précisé ces sources.
« La France veut garder la possibilité de durcir sa position si les choses empirent dans les jours qui viennent », a expliqué l’une d’entre elles, qui a précisé qu’une liste existait déjà avec 19 noms, dont celui de Laurent Gbagbo, mais entre crochets.
L’Allemagne, la Grande-Bretagne ou encore la Pologne poussent pour que cette liste soit confirmée en l’état lundi prochain, lors d’une réunion technique à Bruxelles.
« Rien ne sera décidé aujourd’hui. Une décision devrait intervenir lundi, mercredi au plus tard », a confirmé l’une des sources diplomatiques.
Contacté par Reuters, le ministère français des Affaires étrangères n’a fermé la porte à aucune option.
« Les discussions se poursuivent à Bruxelles. La liste pourrait être adoptée la semaine prochaine. Nous souhaitons dans tous les cas qu’elle le soit rapidement », a expliqué Christine Fages, porte-parole adjointe du Quai d’Orsay.
« Le contenu en sera déterminé en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain et des responsabilités de chacun », a-t-elle ajouté.
BANQUE CENTRALE IVOIRIENNE
Les ministres des Affaires étrangères des Vingt-sept, réunis à Bruxelles, ont décidé d’entamer sans délai le processus visant à geler les avoirs et à interdire de visa vers l’Europe toutes les personnes qui « font obstruction aux processus de paix et de réconciliation nationale et en particulier menacent le bon aboutissement du processus électoral ».
Les sources diplomatiques consultées ont également précisé que la France agissait en coulisses pour qu’Alassane Ouattara prenne le contrôle de la Banque centrale ivoirienne.
« Alassane Ouattara doit pouvoir exercer l’ensemble de ses responsabilités », dit-on au Quai d’Orsay.
Quatre personnes au moins ont trouvé la mort jeudi à Abidjan lors d’accrochages entre les forces de sécurité fidèles au président sortant Laurent Gbagbo et des partisans d’Alassane Ouattara, reconnu sur un plan international comme président élu, ont rapporté des témoins.
Coups de feu et tirs d’armes lourdes ont retenti près de l’hôtel du Golf, quartier général d’Ouattara dans la capitale économique ivoirienne, dans le cadre d’une journée où ses alliés avaient l’intention d’essayer de prendre le contrôle du bâtiment de la Radio-Télévision ivoirienne (RTI).
Julien Toyer et Emmanuel Jarry, édité par Jean-Stéphane Brosse