La crise au F.P.I. expose des strates de la psychanalyse. Cette contribution va tirer de cette discipline le suppôt de sa réflexion. Aussi, le jeu musical des chaises au sein de ce parti concoure-t-il à un tableau dont sa psychanalyse permettrait de comprendre les décombres obscurs des inter-actants à la combustion explosive de cet outil politique. Cette saltimbanque ordonne une visite dans les brumes de l’antiquité. On ne saurait donc saisir les enjeux de cette crise sans graviter autour du mythe œdipien, de sa tragédie et de ses nombreux dérivatifs. On se souvient qu’Œdipe découvre que l’horrible prédilection faite à sa naissance s’est réalisée et qu’il a effectivement tué son père et épousé sa mère. Pour prévenir cette prophétie, ses parents l’avaient pourtant éloigné de la cour royale de Thèbes. Trouvé et adopté par le roi de Corinthe, il rencontre Laios, le tue dans une dispute sans savoir qu’il vient de tuer son père. Arrivant à Thèbes, il résout la devinette du Sphinx et, en récompense de cet exploit, épouse la reine Jocaste, toujours sans se douter que c’est sa mère. Lorsque la vérité éclate, Jocaste se suicide et Œdipe se crève les yeux. Roi déchu, il est chassé de Thèbes par ses propres fils, Polynice et Eteocle. Seule, sa fille et sœur, Antigone, a choisi de l’accompagner sur le chemin de l’errance.
De ce mythe fondateur de la psychanalyse, Freud retient l’Œdipe criminel, ou en tout cas l’histoire d’œdipe attiré, sans qu’ils le sachent ni l’un ni l’autre, par sa mère et finalement consommant l’inceste. Chez Freud, la rivalité entre le fils et le père porte sur l’objet de leur désir, la mère elle-même. Autrement dit sur le penchant libidinal pour la mère. Freud invente alors l’inconscient et le refoulement pour pouvoir éliminer la conscience du désir parricide et incestueux qui ne manque pas d’émerger très vite chez l’enfant.
À l’autre pôle de la pensée freudienne nous retrouvons la théorie du désir mimétique. La théorie du désir mimétique conduit la personne qui en est la victime à imiter le propre désir de son modèle, son puissant rival.
À l’observation de la crise qui sévit au sein du Front Populaire Ivoirien il me semble que L’élément mythique du freudisme fait place à la conception mimétique des inter-actants en présence. Que l’on veuille d’emblée concéder à cette contribution sa faiblesse de l’analyse politique pour ne porter son regard que sur l’architecture humaine de l’homme politique.
À la candidature du Camarde-Président Affi N’Guessan, fils politique du Président Gbagbo, de se succéder au poste de Président du Front Populaire, le fils biologique du Président Gbagbo, criminologue de formation, oppose celle de son père. Ce tableau dénote bien d’une rivalité entre les fils. Cette rivalité n’a rien de libidinal. Elle s’exerce beaucoup plus en faveur d’un désir rigidement objectal. Cette guéguerre entre fils n’est enraciné ni dans le sujet ni dans l’objet mais dans un tiers qui désire lui-même et dont le sujet imite le désir. Et comme un jeu inspiré de l’analyse, une étude du professeur Cheihk Anta Diop sur la vitalité comme mode de gouvernement dans l’Afrique Antique prolonge notre réflexion. De cette étude il ressort que le roi ne pouvait régner si, au cours d’un combat, il avait reçu des blessures ; il devait se faire remplacer jusqu’à sa guérison. Il est vraisemblable que la vitalité comme principe de gouvernement joue dans l’entendement du camarade Président Affi N’Guessan. Le Président Gbagbo incarcéré à la Haye et privé de ses droits politiques et civils ne peut être à mesure de diriger convenablement un parti politique, sommes-nous enclin à loger cette sentence dans la pensée du Président Affi N’Guessan. Aussi, sommes-nous d’avis que le Camarade Président Affi N’Guessan est victime de la conception mimétique et que celle-ci n’a jamais été absente tout au long de son parcours politique. L’observation quotidienne de sentiments de désirs montre que les antagonistes adultes ne parviennent pratiquement jamais à ramener leur antagonisme au simple fait de la rivalité. Cyrus règle sa succession à l’avance en désignant son fils aîné Cambyse qui tuera son frère cadet pour éviter toute rivalité.
Ce détour se veut être un seuil de faits pour prévenir la déflagration du Front Populaire Ivoirien. J’arrive ici à la boucle de mon analyse. J’en en appelle au Président Affi N’Guessan de s’inscrire dans l’élément mythique du freudisme qui concède à l’enfant une maturité plus haute que celle de l’adulte et de faire de l’inconscient le réceptacle du désir parricide en instituant en gendarme la conscience politique de tout un peuple.
Dr. Okou Zéphyrin DAGOU pour IvoireDiaspo
Essai de psychanalyse dans les décombres du Front Populaire Ivoirien.