Le président ivoirien Alassane Ouattara sera
reçu jeudi pour la première fois par le nouveau chef de l`Etat français
François Hollande, pour évoquer l`avenir des relations étroites et
tumultueuses entre les deux pays et la crise au Mali.
M. Ouattara, qui rencontre mercredi le chef de la diplomatie française
Laurent Fabius, s`entretiendra avec son homologue français à l`Elysée jeudi
matin.
Pour la présidence française, il s`agit de donner un « nouvel élan » aux
relations entre l`ex-puissance coloniale et la Côte d`Ivoire, après les
convulsions d`une décennie ivoirienne de tourmente.
L`intervention de la force française Licorne (450 militaires aujourd`hui à
Abidjan) avait été décisive pour mettre un terme à la crise postélectorale
(décembre 2010-avril 2011) aux quelque 3.000 morts, et permettre
l`installation de M. Ouattara, élu face à Laurent Gbagbo, l`ex-président aux
rapports longtemps exécrables avec Paris.
L`un des fondements des relations franco-ivoiriennes est désormais un
« contrat de désendettement-développement » (C2D), préparé sous la présidence de
Nicolas Sarkozy, et rendu possible par l`annulation de la dette ivoirienne
envers Paris, signée mardi soir en présence de M. Ouattara. Sur 20 ans, 2,85
milliards d`euros seront affectés à des projets de développement.
Les deux présidents doivent avoir aussi « un échange approfondi » sur le
Mali, selon l`Elysée.
Alassane Ouattara dirige actuellement la Communauté économique des Etats
d`Afrique de l`Ouest (Cédéao), qui a donné jusqu`au 31 juillet à Bamako pour
former un gouvernement d` »union nationale ».
La France prête à soutenir les Africains au Mali
L`enjeu est de consolider les institutions de transition – mises en place
après le putsch du 22 mars – pour affronter la crise dans le nord du pays,
contrôlé par des mouvements islamistes alliés à Al-Qaïda au Maghreb islamique
(Aqmi). Six Français sont actuellement otages d`Aqmi.
La Cédéao envisage d`envoyer une force régionale pour aider l`armée
malienne à reconquérir le Nord, mais attend un mandat de l`ONU et une aide
extérieure, notamment logistique.
La France est « prête à apporter un soutien à une éventuelle intervention
africaine », « dans le cadre des Nations unies », a redit M. Hollande mardi lors
d`un entretien téléphonique avec le président malien par intérim, Dioncounda
Traoré.
M. Ouattara, dont le pays est voisin du Mali, insiste sur le danger que
représente l`enracinement de « terroristes » en plein Sahel, tout comme son hôte.
Depuis son élection en mai, le président français a d`ailleurs déjà reçu
plusieurs chefs d`Etat africains pour aborder la crise malienne.
Si des deux côtés on invoque de simples contraintes de calendrier,
l`apparente lenteur de M. Hollande à recevoir le président ivoirien a alimenté
les spéculations à Abidjan sur un présumé refroidissement des relations.
« Partenariat inchangé », réplique l`entourage de M. Ouattara. Lui-même a
très tôt assuré que le changement de président en France ne « changerait rien »
à des « relations très fortes et historiques ». A quelques exceptions près, les
socialistes français, longtemps conduits par M. Hollande, ont rompu avant même
la crise de 2010-2011 avec leur ancien « camarade » Laurent Gbagbo.
Mais la relation entre les présidents Ouattara et Sarkozy était marquée par
une amitié de longue date. Le numéro un ivoirien lui avait rendu visite à
l`Elysée au lendemain de sa défaite. Et M. Sarkozy lui avait fait l`honneur de
le recevoir en visite d`Etat en janvier. Un accord de défense révisé avait
alors été signé.
La volonté de « normalisation » de M. Hollande va « peut-être se traduire par
un discours un peu plus critique » sur le pouvoir ivoirien que durant l`ère
Sarkozy, en déduit Gilles Yabi, du centre de réflexion International Crisis
Group (ICG).
La réconciliation en Côte d`Ivoire est en panne plus d`un an après la fin
de la crise et, malgré des progrès, l`insécurité reste préoccupante. De
nouvelles violences dans l`ouest du pays, notamment une attaque contre un camp
de déplacés, ont fait le 20 juillet au moins 12 morts selon l`ONU.
Reporters sans frontières (RSF) a appelé M. Hollande à « ne pas éluder la
question de la liberté de l`information » avec M. Ouattara, souhaitant la fin
des « détentions de professionnels de l`information ».
AFP